Je découvre quelques textes qu’Emmanuel Carrère a écrits et publiés en juin 1990, suite à un voyage dans la Roumanie de l’immédiat après Ceaușescu.
J’y retrouve tous les éléments qui nous avaient frappés nous aussi cet été-là: un « marécage de mensonges, de rodomontades, de calomnies croisées », la « pénurie et le goût cendreux des jours ». Le Front de Salut national « que tout le monde déteste » alors que son président « a été massivement élu » et la responsabilité de cette élection « rejetée sur une population stupide et aliénée. »
La peur que cette population « se contente de peu et sacrifiera volontiers l’ombre de la démocratie à la proie plus tangible de quelques concessions matérielles, un peu de viande et d’essence » car c’est en effet ce à quoi les gens aspirent le plus, un peu de bien-être matériel.
Et la peur des mineurs, venus tout casser et taper du manifestant à la barre de fer.
La peur que « la masse, décervelée depuis quarante ans et entretenue dans cet état par la télévision, continuera d’accepter sans rechigner le régime du parti unique ».
L’amère plaisanterie selon laquelle la Roumanie « est le seul pays dans l’histoire à avoir librement élu des communistes. »
Le sentiment diffus que le pays pourrait facilement glisser vers un nationalisme orthodoxe et xénophobe. Comme le disait ouvertement une religieuse rencontrée au monastère d’Agapia (en Bucovine), pour qui la Roumanie se devait de récupérer la Bessarabie et être un pays avec une seule langue et une seule religion.
photo prise au monastère d’Agapia en juillet 1990
pendant que la religieuse pérorait sur une Grande Roumanie (România Mare) avec une religia şi limbă uniques, un très vieux représentant de cette « masse décervelée depuis quarante ans » était en train de millimétrer le gazon à l’aide de ciseaux.
Les extraits cités d’Emmanuel Carrère viennent de « Il est avantageux d’avoir où aller« , paru chez POL en 2016.
Quand je lis cet extrait « a masse, décervelée depuis quarante ans et entretenue dans cet état par la télévision, continuera d’accepter sans rechigner le régime du parti unique ». , ça me fait sourire. On ne parlerait pas de la France, là ? 😉
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J’ai envie de paraphraser GBALLAND en disant « On ne parlerait pas de 2017, là ? »
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Nostalgie ?
Je connais un bistro roumain en bas de l’Atomium ! 😉
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Comme quoi il faut préférer aux lendemains qui chantent…
les bandes dessinées d’hier que j’ai dénichées… sur un forum roumain !
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el le lisant et en le retranscrivant je me suis dit aussi que 25 ans plus tard ça se vérifiait encore pour bien d’autres pays
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voilà 🙂
et peut-être le pensait-on déjà à l’époque de Cicéron (juste remplacer la télé par les jeux du cirque :-))
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au fait, j’aimerais aller jeter un coup d’œil à la Roumanie d’aujourd’hui 😉
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foarte bine 🙂
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Ah oui, je comprends. J’espère que tu auras l’occasion d’aller y refaire un tour !
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qui sait 🙂
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