G comme gabegie

Le père chante dans une chorale de copains, ce qui signifie, selon la mère, qu’il ne suit la messe que de très loin, là-haut dans le jubé, où – elle en est sûre – il préfère papoter avec l’organiste plutôt qu’écouter le sermon du curé. 

– Mais qu’est-ce que tu en sais, répond-il en haussant les épaules.

– Je le sais parce que je vous entends! On vous entend bavarder jusqu’en bas!

– Ça, dit le père, c’est José.

C’est vrai que l’ami José a une voix de stentor, alors que le père maîtrise l’art du chuchotement.

Deux ou trois dimanches dans l’année, le père est obligé de suivre la messe sans les copains: c’est quand la famille est en vacances au camping en France. Ces matins-là, le père, la mère, le fils et la fille sont toujours parmi les premiers arrivés et si assidument présents dans les premiers rangs, année après année, que le curé de la paroisse a demandé à la mère de bien vouloir faire la première lecture.

– Mais je suis Belge! a répondu la mère, comme s’il y avait un rapport.

– Et alors? a dit le curé, vous êtes Belge mais vous savez lire, je suppose?

Alors la mère a accepté, l’honneur de la patrie était en jeu. 

Puis quand venait le moment de la quête, le père faisait rire la fille en lui chuchotant chaque fois cette petite phrase, au moment où il lui remettait la piécette à déposer dans le panier:

– Et ne pas tout dépenser en même temps, hein!

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les mains du père, dernier chapon, dernier Noël avant la maladie

 

 

 

21 commentaires sur « G comme gabegie »

  1. Ah le bon vieux temps où on s’endormait pendant les sermons, maintenant nous écoutons des homélies ressourçantes ou percutantes ou …
    Pas de gabegie ce week-end Dame Adrienne 😉

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      1. Vous n’êtes pas obligée de vous fournir exclusivement chez Fauchon et Ladurée (désolée je ne connais pas la traduction).

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  2. Mes souvenirs de messe sont principalement des souvenirs d’enfant solitaire,
    Moi, la piécette, je ne devais surtout pas la perdre pendant le long trajet à pied jusque l’église…
    😉

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      1. je le sais 🙂 j’avais la même anxiété à sept ans avec l’argent pour le pain, surtout au retour, avec le grand pain d’un kilo sur un bras et la petite monnaie en main et parfois le petit frère à tenir par l’autre main (ça me semble impensable de nos jours, en tout cas par chez nous)

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  3. Je ne suis pas surpris que les mères soient plus assidues au sermon que les pères.
    C’est sûrement pour ça que l’assistance est si souvent partagée entre les femmes (dans l’église) et les hommes (dans le bistrot en face de l’église).
    Les architectes ont pour une fois tenu compte de la diversité de la population…
    Et puis j’aurais au moins appris que la mère Belge sait lire…

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  4. Dans la langue argotique « mettre de l’argent dans le panier d’osier » pourrait se traduire « du jonc pour l’osier »  » ou « de l’oseille dans l’osier ».

    Des titres bien comme il faut pour la Série noire !

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  5. Je ne vais guère à la messe que dans certaines occasions : mariages, enterrements…
    Mais quand j’étais enfant, je m’arrangeais toujours pour avoir de la très petite monnaie pour donner une minuscule piécette dans le panier à la place de la plus grosse pièce que me donnait ma mère. Grosse pièce que je dépensais à la boulangerie d’en face pour acheter des confiseries mais en calculant bien de façon à ce qu’il me reste au moins une minuscule piécette pour la messe du dimanche suivant.
    C’est que je savais déjà gérer un budget… 😉
    Bises,
    Mo

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