Eunice serre contre elle son petit sac avec les précieux pourboires. Cet argent si durement gagné et pour lequel il faut sourire à toutes les âneries, accepter les mains baladeuses, supporter les exigences, ramasser les papiers sales entre deux séances.
Eunice est fatiguée. Appuyée contre le mur dont elle sent la moulure de bois lui scier le dos, elle a mal aux pieds. Elle n’aurait pas dû mettre ces escarpins noirs, trop hauts, trop élégants pour ce genre de travail. Elle ne sait pas ce qui lui a pris. Un sursaut d’élégance pour compenser cet uniforme bleu nuit qu’elle trouve si mal seyant?
Eunice ne regarde plus l’écran depuis longtemps. Elle suit les films comme le font les aveugles: les mots, le ton, le bruitage, l’accompagnement musical lui suffisent pour tout comprendre sans rien voir. Là, en ce moment, par exemple, elle sait que les héros en sont arrivés au baiser tant attendu. En gros plan.
Debout sous les lampes qui accentuent sa blondeur dorée, le menton dans la main, Eunice se demande quand viendra son tour de rencontrer l’homme qui lui proposera autre chose que ses mains aux fesses.
Elle ne sait pas que celui qui est là chaque samedi à la première séance ne vient pas pour le film: c’est elle qu’il regarde en silence, sans jamais oser l’aborder.
***
tableau (Edward Hopper, New York Movie, 1939) et consignes chez Lakévio, que je remercie!
Elle le remarquera peut-être aujourd’hui, ou demain si ceci n’est pas la première séance …
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vous croyez que c’est un type bien?
😉
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Chi lo sa?
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ma grand-mère disait que c’était une loterie 😉
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On comme c’est touchant cet amour silencieux
Ton récit est agréable à lire
Bonne journée Adrienne
———Mon ancienne salle de cinéma par chez moi a été rachetée par un particulier pour l’aménager en lieu de vie pour sa famille
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merci Rose!
il n’aura lui aussi gardé que les murs, alors 🙂
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Eh bien, il va s’en passer des choses dans la vie de Eunice. En même temps, on ne peut qu’être un peu effrayé de cet homme qui n’ose jamais l’aborder 😉
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peut-être qu’il sera parmi les premières victimes, à Pearl Harbor?
😉
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Un homme un peu timide et réservé ? Sûr qu’il finira par se manifester et qu’il la rendra vraiment heureuse.
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des timides à ce point-là, qui estiment que leur présence régulière est déjà une déclaration, il faut les aider 😉
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il suffit qu’il ose lui sourire en la regardant dans les yeux …… et …. peut-être ….
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c’est vrai que ça pourrait être aussi simple que ça 🙂
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Oh, zut alors… Dans la vraie vie, cela doit se passer. Moralité, il nous faut toujours bien ouvrir nos yeux et chausser de bonnes lunettes !!! Bises. brigitte
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c’est ça, ne pas se laisser gagner par la cécité ambiante 🙂
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C’est vrai qu’elle a des points communs avec la mienne…Comme toi, j’ai été touchée par le sentiment d’intense solitude qui se dégage de cette femme.
Bisous
¸¸.•*¨*• ☆
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oui, solitaire, en retrait, fermée, pensive…
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Si, elle n’a rien remarqué, il ne sera pas l’homme de sa vie. Elle rencontrera son prince charmant ailleurs et j’espère qu’il restera charmant.
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c’est sûr qu’elle ne semble pas avoir flashé sur son physique 😉
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Le film n’est pas toujours sur l’écran.
Et cette fois, pas même chez les spectateurs.
On sent qu’Eunice est désabusée ou qu’elle attend trop Chi lo sa ?
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oui, je la sens tristounette, remuant des pensées peu optimistes 🙂
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Les romantiques n’ont donc pas tous et toutes disparu ?
La première séance débute à midi net ? 😉
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oui, « net », puisque c’est un mec 😉
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Espérons qu’elle croisera son regard et qu’elle sera intéressée avant qu’il ne soit trop tard.
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avant qu’il ne soit appelé sous les drapeaux, tu veux dire 😉
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Si elle ne le sait pas, c’est qu’elle ne l’a pas remarqué, alors il ne doit pas lui plaire…
Peut être trouvera t elle, dans un autre cadre !
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peut-être qu’il a de beaux yeux ou un charmant sourire, mais qu’elle n’a pas encore eu l’occasion de s’en rendre compte 🙂
(rêvons, c’est l’heure…)
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parfaitement imaginé !
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merci les Caphys!
(en imagination on ne peut jamais aller aussi loin qu’en réalité, le vrai peut quelquefois n’être pas vraisemblable ;-))
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J’aime toujours beaucoup tes textes qui rendent bien l’impression générale du tableau à interpréter : là, bien sûr, la solitude et aussi la fatigue, l’ennui peut-être ? Qui sait ? L’attente de la fin de la séance pour pouvoir regagner son foyer, son mari et ses enfants… mais je préfère ta version !
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oui je prends toujours la consigne très au sérieux et j’essaie de faire une lecture du tableau 🙂
merci!
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Jolie version qui met bien l’ouvreuse sous le projecteur. Quel dommage que ce monsieur soit si timide… Espérons que c’est un type bien puisque tu poses la question !
Merci, Adrienne.
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merci à toi, Lakévio!
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Je suis confiante, il a fini par lui parler…
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ne serait-ce qu’un bonjour ou un bonsoir, qu’elle puisse apprécier sa belle voix 🙂
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Il ne doit pas être facile de remarquer un amoureux transi dans la pénombre d’un cinéma… 😉
Bonne soirée Adrienne
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mais si on est l’ouvreuse et qu’on le mène jusqu’à sa place 😉
merci, bonne soirée, bonne nuit!
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J’ai remarqué que l’ouvreuse (dans mon enfance) éclairait le sol avec sa lampe pour guider les pas, surtout dans les escaliers, et non les visages ni même les corps.
Bonne soirée,
Mo
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ah oui pour montrer le siège, sûrement!
mais je n’ai jamais vu d’ouvreuse à l’oeuvre, je pensais qu’en accueillant la personne, elle devait la voir
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