Question existentielle

anuna

Elle a 17 ans, est en Terminale dans une petite ville du nord du pays et le 5 janvier elle a lancé ce mois-ci un appel aux écoliers belges: séchons les cours chaque jeudi pour aller manifester à Bruxelles. 

Spijbelen voor het klimaat! Brossen voor de bossen! (1)

A sa propre stupéfaction, elle a constaté que le jeudi suivant son appel, le 10 janvier, 3000 écoliers avaient rejoint la capitale pour manifester.

Jeudi dernier, ils étaient 12 500, selon les chiffres officiels de la police.

Parmi cette foule exubérante et colorée, quelques élèves de Madame.

Ils ne sont pas fous, ces jeunes: ils placent les adultes – leurs parents, leurs profs, la direction de leur école et finalement aussi leur gouvernement – devant le fait accompli, les obligeant ainsi à prendre parti, à se déclarer: Pour ou contre? Approuver ou désapprouver? Soutenir ou blâmer? Autoriser ou interdire? Applaudir ou punir?

Bien sûr qu’ils n’ont pas le droit de sécher les cours. Mais s’ils manifestaient le mercredi après-midi ou le samedi, quel en serait l’impact dans la presse et sur les dirigeants? Il y a eu 75 000 manifestants en un seul jour pour le climat le 2 décembre dernier, est-ce que ça a fait bouger quelque chose? Voilà ce que cette jeune fille répond. Et elle a raison, bien sûr.

Bien sûr que ces (très) jeunes sont des enfants de leur siècle, qu’ils en sont déjà à leur troisième smartphone, ont déjà pris l’avion au moins vingt fois, sont à tout point de vue dans la (sur)consommation, en un mot que leur empreinte écologique personnelle est des plus désastreuses. C’est à nous de les convaincre que toutes ces « petites choses » (à leurs yeux) font une vraie différence.

Ce qu’ils demandent, ce sont des réorganisations structurelles, globales, efficaces et ambitieuses. Inscrites dans les lois et les accords internationaux. 

On verra bien ce qu’ils diront quand ils le sentiront dans leur confort, leur mobilité, leurs loisirs, leur quotidien… et leur porte-monnaie.

Ou celui de papa-maman, qui pour le moment se déclarent très fiers de leurs manifestants 🙂

source de l’image ici et un article sur le sujet chez Daardaar (traduit du néerlandais)

(1) ‘brossen’ et ‘spijbelen’ sont deux mots qui signifient ‘sécher les cours’, de bossen = les bois

19 commentaires sur « Question existentielle »

  1. Même en France, on a entendu parler de cette jeune fille et du mouvement.
    Ces jeunes sont à l’âge des grandes espérances pour leur futur. Pas à celui du jugement sur leur propre comportement. C’est bien que Madame leur fasse appréhender la réalité du quotidien et re-évaluer les options qui s’offrent pour leur avenir.

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    1. oui, bien sûr, je les comprends et ils le savent mais il faut les convaincre que tout commence dans leur propre vie, qu’ils peuvent vraiment faire une différence grâce à leur comportement (argument qu’ils rejettent souvent en disant que tous ces « petits trucs » ne suffisent pas)

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  2. Il n’y a guère de progrès sans transgression, ils ont donc choisi une bonne voie . Et ne blâmons pas trop leurs contradictions, nous-mêmes en sommes pétris.
    Quant à l’espoir d’une vraie influence pour un changement positif … À 18 ans nous battions le pavé liégeois en scandant « nous sommes tous des étrangers! » Et aujourd’hui…

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    1. ce qui compte, c’est de l’avoir fait 🙂
      la dernière manifestation à laquelle j’ai assisté, c’était pour protester contre les expulsions (après la mort par étouffement de Semira Adamu… même Bernard Foccroulle était là :-))
      ça n’a peut-être rien changé, mais je m’en voudrais de ne pas avoir été là 😉

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  3. Moi, je me souviens de mai 68 (j’avais 23 ans) mais je ne sais pas quoi dire au sujet de cette manifestation d’écoliers de crainte de passer pour une vieille c.nne. A l’époque nous pensions pouvoir changer le monde et puis… il n’y a pas de quoi être fiers du résultat… Donc nous n’avons pas de leçons à donner.
    J’espère que ceux là iront plus loin mais surtout mieux.

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    1. mais oui on peut être fier si on a manifesté selon ses convictions, si on a tenu à faire entendre sa voix pour une cause juste!
      c’est aussi mon message à mes élèves: je vous comprends et vous trouve crédibles si c’est votre conviction et si vous faites vous-mêmes des efforts dans votre quotidien 🙂

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