T comme tu t’y vois?

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Il faut qu’on se parle, dit Madame à Arne. Pas contrariant, il est ponctuel au rendez-vous. J’ai comme l’impression, dit Madame, que tu négliges complètement tes études… Qu’est-ce qui se passe? J’aurai bientôt 18 ans, dit-il, et je pense arrêter mes études. Arrêter tes études? Avant la fin de l’année? Quand tu es si près du but? Et pour faire quoi, à la place? Ben, je ne sais pas, aller travailler… Et qu’est-ce que tu crois trouver, comme travail?

C’est là qu’on voit l’hésitation. Il n’en a pas vraiment idée.

Tu as déjà regardé les pages des offres d’emploi? Tu as vu les compétences demandées?

Oui, il sait qu’il n’a aucune qualification.

Je sais bien, dit Madame, qu’il faut des gens pour balayer les rues ou ramasser les poubelles, et j’ai un immense respect pour ceux qui le font, ils font un travail utile et dur, mais je suppose que ce n’est pas à ça que tu penses, quand tu dis que tu vas arrêter tes études et aller travailler?

Il rit. Non, ce n’est pas ce qu’il voudrait.

Alors samedi, de passage à Bruxelles, Madame voit se balancer deux laveurs de vitres et elle repense à sa conversation avec Arne.

Elle espère qu’il terminera sa formation professionnelle en électricité.

33 commentaires sur « T comme tu t’y vois? »

  1. C’est étrange leur idée du travail, ils le voient comme une libération…même caissière à Carrefour semble mieux qu’écolière à « ma » Veronica (16 ans, bonne élève, milieu très défavorisé).
    Je me dis que l’école est en partie coupable de ne pas arriver à leur donner le goût d¡apprendre, de savoir.
    Bon dimanche dame Adrienne.

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      1. moi je vois surtout beaucoup de culpabilité chez les parents (genre « j’espère que tu n’as pas trop de devoirs à faire parce qu’il y a une chouette émission à la télé », phrase authentique parmi d’autres), dans l’éducation (genre: les enfants « nourris » à la tablette depuis tout bébé, comme ça ils sont tranquilles et on ne les entend pas), dans la société… je refuse de voir la faute de l’école chez tous ces jeunes dont je m’occupe et qui ne dorment pas la nuit parce qu’ils passent tout leur temps libre à des jeux en réseau

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      2. Je ne parle pas ici de la faute des enseignants, mais de l’institution scolaire arrogante, rigide, incapable de s’adapter, qui provoque la fuite tant des élèves que des enseignants.
        En plus de 30 ans, j’en ai trop vus des enfants fracassés et des collègues exténués.
        Les familles, pour imparfaites qu’elles soient, sont celles d’aujourd’hui, face à une école d’hier qui continue à se croire le centre du monde.
        Et puis, il y a heureusement tous les signes d’espoir, les profs rebelles et créatifs, les enfants qui se mobilisent, les familles heureuses …

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    1. le statut d’étudiant leur permet de gagner des sous en faisant divers jobs et ça leur semble vite une fortune facilement gagnée… ils ne se rendent pas compte que la donne devient complètement différente dès qu’ils n’ont plus ce statut d’étudiant (et qu’il s’agit de vraiment gagner sa croûte et payer des impôts)

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  2. « En même temps » comme dit notre Président, j’ai déjà vu tant de jeunes gens arrivés à Bac+5 derrière des caisses de supérette et d’autres sortant d’écoles d’ingénieur démarrer par un an de chômage suivi d’un an au SMIC pour les amollir que je finis par comprendre, même s’ils ont tort, qu’ils veuillent laisser tomber les études.
    Ce qui était un viatique est devenu un miroir aux alouettes pour beaucoup.
    (et pour leur remonter le moral les journaux professionnels montrent que l’IA fait très bien leur boulot et se contente d’électricité et pas de sous…)

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      1. Un certain nombre de jeunes gens qui sortent avec un diplôme d’ingénieur, si ce n’est pas Polytechnique (là ils sont happé par l’administration…) veulent gagner un peu de sous.
        Ils en ont marre de ne pas pouvoir payer un Coca (ou plus) à leur copine ou changer de chemise à leur gré.
        S’ils sortent d’un milieu un peu « juste » du côté des sous, ils abandonnent pour vivre un peu mieux.
        J’ai eu des stagiaires tout à fait aptes à devenir ingénieur qui ont laissé tomber parce que les carrières commerciales leur semblaient plus rentables dans l’immédiat.
        Bagnoles neuves, costards et possibilité d’inviter les filles au restau beaucoup plus tôt…
        Ça arrache un peu le cœur…

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      2. je connais ce tableau pour la France (et il faut ajouter à cela le coût des études) et mon filleul (français) a connu cette galère, il a travaillé dans un Décathlon comme vendeur avant de trouver un beau job dans une banque… mais ça ne reflète pas (pas encore?) la réalité chez nous (en tout cas pas du côté flamand où la plupart trouvent un job à leur mesure dans l’année)

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  3. C’est étrange cette utopie que poursuivent beaucoup de jeunes : le travail va les libérer des contraintes des cours, de l’apprentissage, et leur donner un graal qu’ils mériteront c’est sûr en se débrouillant.
    J’ai été très déroutée quand un garçon très brillant, que j’ai connu tout petit et suivi tt au long, qui me disait qu’il ne ferait pas prépa, mais a visité des écoles qui lui permettraient un travail dans le BTP en pays étranger. Ce qui n’a rien de bizarre, sauf qu’il se destinait il y a deux ans à peine à un professorat d’Histoire ou du journalisme.
    Je crains toujours qu’il ne veuille apprendre « sur le tas » !

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    1. ce que je constate, c’est que le problème touche surtout les élèves des sections professionnelles: ils ont hâte de se libérer de l’école dans l’idée de gagner de l’argent…

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  4. Je me souviens d’une élève de rhéto qui avait fait de même, elle travaillait comme vendeuse dans un magasin de vêtements et préférait gagner de l’argent tout de suite. Deux ans plus tard, elle le regrettait déjà et avait repris une formation. Quand on veut gagner du temps et qu’on en perd…

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    1. c’est un scénario que j’ai déjà vu chez deux filles, sous l’influence d’un mec – plus âgé – avec qui elles veulent se mettre en ménage et qui préfère qu’elles arrêtent les études…

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    1. ce garçon est fils unique, ses parents travaillent tous les deux, il a « tout ce qu’il désire » (je devrais mettre trois paires de guillemets…) mais malheureusement ce qu’il désire c’est jouer 😉
      (je ne comprends pas ce que tu veux dire avec ton osé pas oser)

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