Devoir de Lakevio du Goût No 68

« Il semble que ce qui vous pousse brusquement à la fugue, ce soit un jour de froid et de grisaille qui vous rend encore plus vive la solitude et vous fait sentir encore plus fort qu’un étau se resserre. »
Bien sûr on se souvient de Dora Bruder, de l’enquête du narrateur, cinquante ans après les faits, et on pourrait rejouer ce triste doublé-dédoublé, comme le négatif d’une photo d’autrefois, en repensant à une petite fille de 1970 qui prépare sa fugue, elle aussi.
Elle sait que le moment idéal n’est pas « un jour de froid et de grisaille« , mais que ces jours-là viendront, et qu’il faut les prévoir.
Elle n’a pas douze ans mais elle sait que la vraie solitude ne peut être pire que celle qu’elle vit.
Elle se revoit à la minute exacte où elle regarde par la fenêtre de sa chambre et se rend brusquement compte que là, derrière le bosquet, derrière la colline, il y a une grand-route et juste après, il y a sa grand-mère.
C’est la minute exacte où elle sait que son projet n’est pas « en suspens« : elle ne fuguera pas.
***
Cette toile de Pissarro vous inspire-t-elle ? Je l’espère, dit Monsieur Le Goût. Le mieux serait que vous commençassiez ce devoir par :
« Il semble que ce qui vous pousse brusquement à la fugue, ce soit un jour de froid et de grisaille qui vous rend encore plus vive la solitude et vous fait sentir encore plus fort qu’un étau se resserre. »
Et que vous le terminassiez par :
« Je vais laisser cette lettre en suspens… »
Pauvre petite fille . Si je pouvais, je la serrerais bien fort dans mes bras.
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vous êtes adorable, Mme Chapeau
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J’avais déjà lu rue des boutiques obscures en août, alors, pour Dora Bruder, à la douzième page, j’ai abandonné !
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oui on en a déjà parlé ici, moi j’ai persévéré, j’en ai lu plusieurs sans être convaincue, heureusement je ne suis pas jury du Nobel 😉
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Heureusement qu’il y avait ta grand mère pas loin, elle devait t’apporter du réconfort.
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c’était une époque où je la voyais trop peu, entre mes huit et douze ans
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Une minute exacte qui en rappelle d’autres, quasi identiques, dans l’enfance de tout un chacun. bien construit.
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beaucoup d’autres enfants, c’est certain (et c’est fort triste de se le dire)
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Les grand’mères sont les meilleures alliées des petites filles tristes.
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je plains les enfants qui n’ont pas ce lien d’amour avec leurs grands-parents, quelle qu’en soit la raison.
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J’aurais bien aimé être une de ces grands-mères. Mais, faut croire que mes petites filles sont heureuses, car, elles parlent peu. C’est moi qui leur parle parfois de ma jeunesse et « les asticote »…
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je ne faisais pas de confidences à ma grand-mère, ça l’aurait trop attristée
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Ah le beau Paris de Pissarro ! Tu sais que j’ai aimé « Dora Bruder », c’est même le premier Modiano que j’aie lu en entier. Quant à la solitude qu’on peut ressentir à l’adolescence, je m’en souviens aussi (à 13 ans surtout, pour ma part).
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à partir de mes douze ans, les livres m’ont aidée (avant je n’y avais pas droit)
Dora Bruder est le seul qui raconte quelque chose d’autre que lui-même et ses errances dans son passé et dans paris (quoique cette part, même ici, reste majoritaire ;-))
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Moi aussi, j’ai abandonné la lecture de Modiano mais il faut reconnaître que son évocation de la solitude est poignante comme un « étau qui se resserre ». Et que cet éclair de vie de petite fille l’est tout autant. Danielle
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Modiano n’est pas joyeux, ce serait déroger 😉
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Très juste 😉
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Evidemment, j’ai oublié de cliquer pour envoyer le commentaire…
Il était pourtant enthousiaste.
Comme souvent (en fait, toujours) j’ai jalousé ta facilité d’expression et de pouvoir dire en peu de mot l’essentiel.
Bref, c’est chouette.
(en plus, si tu savais comme je comprends cette petite derrière sa fenêtre, ça me rappelle la pension de mes fondus du bon dieu)
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je peux l’imaginer
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Je n’ai jamais lu le moindre Mediano ou alors j’ai oublié… 😉
Il est bien triste, ton texte…
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Modiano (mon clavier n’a pas l’air de connaitre… 😉 )
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En même temps, c’est bien joli, le Cirque Médiano !
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vu qu’il n’y a généralement que peu ou pas d’intrigue, ça s’oublie facilement 😉
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Le tag anti-Modiano : Vive la famille !
La krapoverie du jour : Ce qui poussait Jean-Sébastien Bach à la fugue, c’est qu’il avait une sacrée famille à nourrir !
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les nourrir, c’est bien, les aimer, c’est mieux, j’imagine qu’il les aimait (Astier a fait une belle conférence là-dessus, sur son chagrin présumé pour ses enfants morts-nés ou morts très jeunes)
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Et ça ne lui arrangeait pas le caractère.
Il fut, il me semble, rappelé à l’ordre pour avoir rossé un bassoniste dont il était mécontent.
Faute de syndicat, l’orchestre s’est écrasé…
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Je ne connaissais pas Dora Bruder. Grâce à ton lien, j’en sais un peu plus, mais non, même pas, on reste sur notre faim. Personne n’avait l’air de connaitre cette jeune Dora. Modiano est aussi resté sur sa faim…des faits, rien que des faits mr le Juge. Cette ado devait être bien mal dans sa peau, pour fuguer, malgré le danger de l’époque. Elle ne devait pas être heureuse chez elle. Peut-être à cause de secrets de famille bien gardés…Combien de fois ai-je eu envie de fuguer, mais, sans jamais sauter le pas ?..C’est aussi grâce à la lecture que j’échappais à mon triste quotidien, et pourtant, dieu sait que ma mère ne voulait pas nous surprendre en train de lire. Pour elle, c’était gaspiller son temps…
Si, j’ai fugué, adulte. Mais, peut-on appeler ça une fugue ! Adulte, on dit « prendre des vacances, se payer du bon temps, fuir les emm….es ». D’ailleurs, adulte, je faisais en sorte d’avoir mon confort quand il m’est arrivé de prendre la poudre d’escampette. Quelles personnes a croisé sur son chemin la jeune Dora ? On en sait rien…Au moins, avec Anne Franck, on l’a vue vivre, enfin si on peut appeler vivre, être enfermée dans un grenier durant des mois et des mois.
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il a mené une longue et minutieuse enquête pour apprendre des choses sur elle mais finalement la seule chose qu’on sait avec certitude c’est Drancy, puis sa déportation.
Et oui, lecture = oisiveté = mère de tous les vices, je sais, je lisais quand j’étais supposée travailler pour l’école 😉
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Tiens, j’ai fait comme toi, j’ai lu en cachette. Bizarrement, ma mère, l’année de mon brevet, m’a laissé tranquille et me laissait « travailler ». Je mettais donc un livre entre 2 pages d’un cahier…Elle n’y a vu que du feu…heureusement pour mes fesses..
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voilà, le livre sous les cahiers d’écolière 🙂
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Ainsi, nous sommes plusieurs à avoir eu envie de fuguer, mais nous ne l’avons pas fait… heureusement ! J’étais par ma mère interdite de lire le soir, non par perte de temps (ma mère lisait beaucoup) mais pour « ne pas abimer mes yeux » avec les ampoules de 25 watts.
Au temps de ma jeunesse, les parents ne disaient jamais à leurs enfants qu’ils les aimaient, et ce n’était pas forcément vrai s’ils l’avaient prononcé ces mots tabous.
C’est vrai qu’on élevait les enfants, on les nourrissait, mais les aimait-on vraiment ?
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ah oui, s’abîmer les yeux! ma grand-mère aussi croyait que la lecture les usait 🙂
je ne pense pas que l’amour doit être dit, comme dans les films américains où à tout bout de champ on se lance des ‘I love you dad/mom/son’ etc.
En tout cas ma grand-mère n’a jamais eu besoin de le dire, ça se sentait, se remarquait à mille petites choses (tout comme le manque d’amour se sent, se remarque à mille petites choses ;-))
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ma grand mère n’était pas du tout « chaleureuse »! et ma mère ne nous disait jamais qu’elle nous aimait mais , finalement elle n’a vécu que pour s’occuper de nous…. pas le temps pour les déclarations!
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C’est bien dur pour cette petite !Heureusement qu’elle a sa grand mère !
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Grand-mères ! Grand-mères ! Grand-mères !
Refuges de bien des mystères
Voilà pour quoi l’on vous confie
Les nôtres, pesant sur nous vies
Et, d’un coup ! s’allège la charge
Grâce à la bonté de votre âge…
Moment tout en subtilité que tu nous offres là, Adrienne chère. Merci 🙂
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merci Tiniak pour ce beau commentaire!
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