H comme haar

Il y avait comme un air de griserie dans le parc, dimanche matin. Depuis la veille, les terrasses étaient ouvertes et on voyait des gens installés sous les parasols, bien sagement espacés avec un maximum de quatre par table.

D’autres marchaient pressés, un bouquet de fleurs à la main, pour une épouse, une maman.

Bref, un air de fête.

Madame avait décidé de s’offrir un cappuccino à la terrasse d’une ancienne élève que son Bac+5 en sociologie n’avait pas empêchée de se lancer dans la reprise d’un café.
Juste avant la pandémie.
Vous comprenez donc la sympathie de Madame.

Il faisait un temps à lunettes de soleil, aussi se promenait-elle en jupette et sandalettes.
Erreur fatale.

– Tu me reconnais avec le masque? demande-t-elle à Marie, puisque ça fait tout de même une paire d’années qu’elles ne se sont plus vues.
U bent geen haar veranderd! (1) répond-elle.

Ce qui a beaucoup fait rire Madame, parce que si quelque chose a bien changé, ce sont ses cheveux, qui ont cessé d’être courts.

Le cappuccino ressemblait à un latte – avec la pandémie, Marie n’a pas eu l’occasion d’exercer ses talents de barista – mais la conversation était fort agréable.

C’est au moment de payer que Madame a compris que le temps chaud lui avait été fatal: son portefeuille et sa carte de banque étaient restés dans la poche de son manteau.

Par bonheur, il lui restait un billet de 5 €.

Sans cela, le geste de sympathie aurait dû s’appliquer en sens inverse 🙂

***

(1) littéralement, l’expression en néerlandais se traduit par « vous n’avez pas changé d’un cheveu » (haar = cheveu)

Merci à Monsieur le Goût pour ses consignes:

M. Caillebotte n’a pas peint que le pont de l’Europe, la gare Saint Lazare, des « racleurs de parquet » ou les trottoirs parisiens. Non, il a peint aussi de la verdure. Et pas que celle de sa propriété d’Yerres. Je vous soumets cette toile qui me prouve que là où je me suis promené il y a peu était beaucoup plus touffu il y a 150 ans qu’aujourd’hui. Les bancs n’ont cependant pas changé. Que vous dit cette toile ? Un souvenir de parc bien loin de celui-ci apparaît dans ma cervelle noyée dans son habituel « cafouillon » matinal…

54 commentaires sur « H comme haar »

  1. Ah mais quel plaisir de lire cette liberté retrouvée, le soleil, ce dimanche festif !

    Pour le cheveux, cette expression aussi en espagnol « no tener ni un pelo de tonto » ( ni un cheveu d’imbécile ) donc un esprit vif…qui a trouvé 5€ , vite fait !!!

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  2. Distraite un jour, distraite toujours. Marie a bien raison:
    – U bent geen haar veranderd!
    Merci pour le sourire matinal et bon lundi en sandalettes.

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    1. ah dans ce sens-là, vous avez raison! j’ai dû accrocher un masque à la poignée de la porte pour être sûre d’en avoir toujours un en sortant de chez moi 😉
      merci à vous, bonne journée!

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      1. Après une averse, la température est montée à 26° sur la terrasse – parfait pour prendre le thé dehors. Pluie plus abondante ce matin, pas chez toi ?

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  3. C’est bien d’avoir un billet dans ses poches, parfois même on en découvre par hasard.
    Si tu avais eu besoin du manteau, l’envie de t’installer à une terrasse n’aurait pas été la même 😉

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  4. Je suis allé à la (petite) terrasse d’un sympathique petit café de mon quartier (pas branché du tout) et j’ai mangé une goulasch, avec une bière CTS (brune légère, servie dans une chope en étain) et une dame blanche. Et j’ai lu une partie du volumineux « Libération » du samedi. Bon moment, mais pas immortel. Et puis, c’était seul, ce qui n’est pas nécessairement drôle.

    Et heureusement, la nuit de dimanche à lundi a été calme. Plus de débordements ni de clameurs…

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    1. c’est l’avantage que j’ai, dans ma petite ville, et avec mes anciens élèves: j’étais seule mais Marie m’a fait la causette de bout en bout 😉
      et un monsieur à chien attablé aux distances plus que réglementaires a même cherché par moments à s’immiscer dans la conversation 😉 (il tenait à parler covid ;-))

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      1. J’ai un peu parlé (notamment du Covid ;o) à deux trois personnes à des tables voisines, mais elles ont vite raconté des choses fausses (par exemple que les vaccins sont inefficaces contre le « variant anglais »). Puis une vieille dame, qui arrondit sa maigre pension d’indépendante en allant nourrir des chats dont les maîtres sont absents, a lié connaissance à des personnes attablées qui avaient justement des chats à nourrir ou à garder, de temps en temps ; cette conversation, qui s’engageait vers une sorte de relation commerciale en construction, ne m’intéressait guère, alors je me suis replongé dans la lecture de « Libération »…

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      2. c’est vrai que moi aussi j’ai dû rectifier le tir 😉 et je me suis dit par après que s’il était tombé sur un antivaxx, ça aurait donné une tout autre conversation

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  5. Je vois que tu as bien profité des nouvelles autorisations…
    Ici, en Bretagne, les cafés n’ont pas vraiment attendu la permission… Je ne devrais pas cafter, ce n’est pas bien… 😉

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    1. ah bon?
      je ne comprends pas comment un pays où des gens font exactement ce qu’ils veulent sous prétexte d’égalité-liberté etc (là où vit ma mère, chacun lui dit « on est en pays libre, ici, alors moi je ne mets pas le masque ») est en même temps habité par cent mille signataires (en un seul jour?) d’une lettre ouverte de militaires menaçant de coup d’État 😉
      faudra m’expliquer comment les deux se combinent!

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      1. La devise de la république française, « Liberté-Egalité-Fraternité » est à mon avis la plus belle qui existe, mais la mise en pratique n’est pas toujours évidente. Qu’il y ait un quart de l’électorat qui vote régulièrement pour un parti d’extrême droite en est une des preuves ;o)

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  6. Différents pays différentes règles. Ici deux personnes par table au resto et le Québec est séparé en zones. Montréal est en zone rouge et nous en Mauricie à 150km en orange. Donc je ne peux aller au resto avec un zoné rouge il n’est pas accepté carte en main s.v.p. Pourtant ils peuvent venir en zone orange je ne comprends pas pourquoi ils sont plus dangereux au resto…
    Cappucino, robe et sandales, rencontre, chaleur tout pour passer une journée agréable.

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    1. c’est sûr que dans tous nos règlements il y a des incohérences, c’est aussi ce qu’argumente le secteur culturel: pourquoi nos salles de spectacle seraient-elles plus contaminantes que les transports en commun, alors que nous y respectons des protocoles sévères?

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    1. en effet 🙂
      il y avait longtemps que ça ne m’était plus arrivé (quoi qu’en dise Mme Chapeau non, je rigole, elle a raison) bref l’autre fois que j’avais oublié ma carte de banque j’ai été sauvée par un billet et toutes mes piécettes 😉

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  7. Ah, un vent de liberté! pour les terrasses et les orteils!
    😀
    Une (toute petite) ardoise chez ton ancienne élève aurait été l’occasion toute trouvée pour y retourner fissa et reprendre un deuxième café !
    😉
    Et le petit billet que je glisse dans la poche de l’étui de mon portable m’a déjà sauvé la mise plus d’une fois…

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  8. Bravo pour l’adéquation entre le vécu et les consignes ! Dans notre petit patelin, il n’y a plus de cafés avec terrasse. Quant à Namur où nous sommes allés faire un tour samedi soir, même si les tables comptaient génralement près de dix convives chacune, il n’y avait plus une seule table libre 😦 . Finalement, nous avon pris l’apéro à deux sur notre terrasse, comme si l’Horeca n’avait pas rouvert…

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      1. C’est le genre de jeu de mots auxquels se livrent les coiffeurs, en Belgique francophone et en France :
        « Hair France », « Imagin’hair », etc.

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      2. oui j’en ai déjà parlé, Philippe Didion en fait collection (en photo) et je lui en ai déjà envoyé (En Flandre aussi on trouve des enseignes avec ce genre de jeux de mots, partout au monde, probablement ;-))

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