Le premier miracle de l’année 2023 a eu lieu un soir de la semaine passée: l’électricien qui devait venir faire deux petits travaux de réparation depuis juillet 2022 était enfin à la porte de l’Adrienne.
Elle a failli ne pas le reconnaître 😉
Et pour rendre ce coup du hasard encore plus fabuleux, c’était exactement le jour où dix ans plus tôt, l’Adrienne avait signé le compromis de vente pour la maison de tante Fé.
Fêter cet anniversaire avec deux nouvelles prises de courant, quel cadeau merveilleux 🙂
***
Photo de 2013 et des travaux plus conséquents qui ont dû avoir lieu à ce moment-là 🙂
Dites à l’Adrienne qu’elle prenne son courage et son automobile – un zeugme par jour, en forme toujours – pour aller visiter l’expo sur l’Égypte au musée de Mariemont!
Sinon, ce sera comme les fois précédentes, hésiter, tergiverser et pouf! l’expo est terminée.
Ou une pandémie arrive, enrichissant notre vocabulaire et nos façons de nous occuper seuls dans notre coin.
« Noël au balcon, Pâques aux tisons », on peut se demander ce que valent encore nos anciens dictons météo en ces temps de désordres climatiques.
Nous passons à l’an neuf avec des températures positives « record », ce qui n’est plus tellement un scoop vu que tout est « record » ces derniers temps 😉
Aussi avons-nous été bien surpris par les moins sept vers la mi-décembre – ce n’était même pas encore l’hiver, dites donc – et c’était bien joli, si joli que ce dimanche-là, l’Adrienne a fait une douzaine de kilomètres à pied dans une blancheur qui n’était pas de la neige, mais la conséquence de deux jours et de deux nuits de givre.
Trois gamins avaient décidé de s’aventurer sur la mare aux canards, qui était gelée.
Et vous qui connaissez l’Adrienne, vous ne serez pas surpris d’apprendre qu’elle a voulu s’en mêler et leur faire quelques recommandations – une glace de deux jours, était-ce assez épais? elle ne le pensait pas!
Et si vous connaissez aussi les gamins, vous ne serez pas étonnés d’entendre qu’ils étaient sûrs de leur affaire, geste à l’appui: Ne vous inquiétez pas, Madame, c’est gros comme ça!
La carissima nipotina a suggéré quel cadeau lui ferait plaisir pour Noël: des photos dûment imprimées au lieu d’être envoyées de manière virtuelle.
De vraies photos qu’elle pourra mettre au mur, dans des cadres, des albums.
Le jour même – c’était à la mi-novembre – l’Adrienne se met au travail. Recherche des sites où on peut tout envoyer pour créer des albums ou faire imprimer des photos. Il y en a même qui livrent en magasin.
Formidable.
C’est une chose qu’elle n’avait encore jamais faite, elle a donc un peu décidé au hasard à qui elle confierait la commande. Elle y passe évidemment une paire d’heures. Ceux qui ont déjà recherché dans leur « collection » toutes les photos où on voit une certaine personne le comprendront tout de suite: ça prend du temps. Ouvrir chaque fichier marqué ‘Ostende’ ou ‘nipotina’, ceux qui regroupent les photos du temps de la maison dans le vert paradis et ceux de la maison en ville… Dans tous ceux-là on peut trouver des photos de la nipotina.
Puis l’Adrienne a encore une idée géniale 🙂
Elle fera de même pour tante Suzanne! Justement, le premier décembre, c’est son anniversaire.
Just in time, se dit l’Adrienne, se fiant aux promesses du site: dans trois jours ouvrables vous aurez votre commande en magasin. Maximum quatre.
Las! vous qui connaissez la vie, vous avez déjà deviné la suite. Ni trois ni quatre ni huit jours plus tard…
Je hebt het nog tegoed, a-t-elle écrit sur la carte d’anniversaire.
Espérons que ce soit en ordre pour Noël 😉
***
Je hebt het nog tegoed est une de ces expressions qui ne se traduisent pas littéralement. C’est quelque chose comme « tu ne l’as pas encore eu mais ça te revient et tu vas l’avoir »
On écrit aux absents on leur écrit des lettres dans nos têtes des messages sur les réseaux que les autres liront on leur écrit avec nos yeux qui se laissent perdre au fond du ciel ou devant une photo on leur écrit sans ne rien dire ou en disant à tout le monde sauf à eux on leur écrit dans la lumière de l’aube et du crépuscule dans les fossés lorsque l’on marche sans aller nulle part dans l’automne lie de vin des feuilles qui tombent dans l’hiver silencieux dans les pétillements doux et violents du printemps dans l’éternité de l’été on leur écrit des mots de rien des phrases simples qu’il nous aura fallu la moitié d’une vie à atteindre on leur écrit qu’il n’y a que le temps qui sauve de l’amour et qu’il n’y a que l’amour qui sauve du temps
Première fois cette année qu’il n’y a plus que l’Adrienne pour aller dire bonjour au grand-père paternel, à la petite Ivonne et aux deux petites sœurs, au vieux cimetière.
Dans une de ces nombreuses écoles où Madame a été réaffectée, il y avait deux Rita au secrétariat, et ce qui faisait beaucoup rigoler – elles les premières – c’est que l’une s’appelait Van Boven (d’en haut) et l’autre Van Beneden (d’en bas)
Alors quand Madame a vu sur le site d’Ostende qu’un certain Pierre-Joseph Van Beneden avait fondé le premier laboratoire et le premier aquarium destinés à l’étude de la biologie marine, en 1843, elle a d’abord pensé aux deux Rita avant de s’intéresser à Pierre-Joseph 🙂
Comme disent dédaigneusement nos voisins hollandais, vous les Belges, vous ne savez pas vous vendre 😉
***
L’illustration (source ici, où on peut voir aussi un portrait du monsieur) montre l’emplacement de cet institut, au 19e siècle, sur l’Oosteroever d’Ostende, dans l’huîtrière de la famille Valcke-Deknuyt.
Malgré la chaleur qui humidifie chemise et T-shirt, ils se tenaient collés-serrés, main dans la main, sa tête à elle lovée dans son cou à lui, là où quelques poils de barbe chatouillent agréablement la peau.
Ils étaient en arrêt devant un tableau dans un cadre doré qui ne lui convenait pas du tout. On y voyait un couple enfoncé dans la douceur des draps, des oreillers et de leur étreinte.
Un léger parfum d’érotisme s’en dégageait.
– Il paraît, finit-elle par dire, alors que lui était précisément en train de rêver à leur premier baiser, et peut-être aussi au prochain, il paraît que Toulouse-Lautrec aimait les rousses. Qu’est-ce que tu dirais si je me teignais les cheveux en roux?
Cette toile de Joseph Lorusso, comme celle de Karin Jurick que je vous ai proposée la semaine dernière, montre un tableau intitulé « Le Baiser ». Il n’est pas peint par Klimt mais par Toulouse Lautrec. Vous inspire-t-il ? Je vous le propose comme « devoir de vacances ». Et pour ce « devoir de vacances » ce serait gentil si vous vouliez bien user des mots suivants : oreiller – douceur – roux – parfum – chatouillent – main – chaleur – cou – cadre – T-shirt.
La première fois que l’Adrienne a entendu parler de chiens tirant des charrettes, dans sa Flandre jusqu’aux années de l’entre-deux-guerres, c’était dans un article sur le Japon.
Pourquoi les touristes japonais sont-ils pris d’une si grande émotion devant le tableau de Rubens exposé à la cathédrale d’Anvers, La Descente de croix? Pourquoi, quand ils savent que tu es Flamand(e), commencent-ils à te parler d’un chien qui s’appelle Patrasche? Et pourquoi s’étonnent-ils que tu ne le connaisses pas?
Et bien, parce qu’il s’agit du personnage d’une histoire écrite au 19e siècle, en anglais, qui a apparemment un succès énorme auprès des écoliers japonais et américains mais qui n’a été traduite en néerlandais qu’en 1987. Même les nombreuses versions filmées n’étaient pas parvenues jusqu’ici. Une histoire larmoyante d’un petit orphelin et son chien dans une Flandre anversoise imaginaire.
En 2007, deux réalisateurs de documentaires se posaient encore la question: comment se fait-il qu’une histoire si connue dans de nombreux pays n’intéresse personne chez nous?
Bref, en visitant l’expo consacrée aux photographes ostendais, Maurice et Robert Antony, l’Adrienne n’a pas manqué de remarquer les charrettes tirées par des chiens, comme sur l’illustration ci-dessus, une photo du 4 juillet 1924.
Généralement un ou deux chiens, toujours avec muselière, tirant la charrette du laitier, du charbonnier, du poissonnier, du chiffonnier…
***
Expo photos de Maurice et Robert Antony à Ostende jusqu’au 5 novembre 2022, info ici.
C’est aussi grâce au généalogiste dont il était question dans le billet d’hier que l’Adrienne a pu découvrir qu’une légende familiale n’était pas une légende, en fait.
Une première découverte!
En effet, une grand-tante côté paternel prétendait que si quelques-unes des descendantes de l’arrière-grand-père Ernest avaient les yeux si sombres et les cheveux si bruns, c’est parce qu’il y avait « du sang espagnol » dans la famille.
Une affirmation qui faisait toujours se soulever les épaules et lever les yeux au ciel, en premier lieu chez le père de l’Adrienne – il faut bien qu’elle tienne de quelqu’un son côté « saint Thomas », comme dit sa mère.
Bref, personne n’en avait la preuve.
Mais maintenant la preuve est là. Même s’il faut remonter si loin que le lien avec les yeux sombres en devient de plus en plus ténu, mais soit: il y a du sang espagnol.
Essayez de suivre 😉
L’arrière-grand-père de l’arrière-grand-père Ernest s’appelle Natal. Né en 1762. Ce prénom, assorti à un nom de famille flamand, avait semblé bizarre à l’Adrienne. Aujourd’hui, tout s’explique: la maman de Natal a comme nom de famille García.
CQFD.
Avec encore une fois de nouvelles questions qui se posent, quand comment pourquoi Ana Josepha García est arrivée en Belgique…
(et non aucun rapport avec un sergent californien)
***
sur la photo, la très brune petite Ivonne posant fièrement avec son mari et leur premier-né, l’été de 1925.