Première fois

Dites à l’Adrienne qu’elle prenne son courage et son automobile – un zeugme par jour, en forme toujours – pour aller visiter l’expo sur l’Égypte au musée de Mariemont!

Sinon, ce sera comme les fois précédentes, hésiter, tergiverser et pouf! l’expo est terminée.

Ou une pandémie arrive, enrichissant notre vocabulaire et nos façons de nous occuper seuls dans notre coin.

Bref, ce serait une chouette première fois 🙂

M comme Mohenjo Daro

Un tiers du territoire sous eau, le lieu de vie d’environ 33 millions de personnes détruit, dans un des pays les plus pauvres sur terre.

« Coup de gueule » du secrétaire-général de l’ONU qui accuse – à juste titre – la folie du monde: ce ne sont pas les gros pollueurs qui sont les premières victimes du réchauffement climatique.

Et comment réagit l’Unesco?

Elle pourrait retirer le site de Mohenjo Daro (source de la photo ci-dessus) de la prestigieuse liste du « Patrimoine mondial » vu que le pays ne réussit pas à fournir l’effort financier nécessaire pour le préserver des pluies ou des inondations…

Quand on pense qu’il faudrait au moins 10 milliards de dollars pour réparer et reconstruire les infrastructures endommagées ou détruites, une somme impossible à rassembler pour un pays comme le Pakistan. 

Et que la priorité devrait être de nourrir et d’abriter les plus de 33 millions de personnes victimes des inondations… dont certaines ont précisément trouvé refuge dans les ruines du site.

Bref, folie.

T comme tendance

C’est depuis 2020 que l’église gothique est en travaux divers, à commencer par une nouvelle toiture, et aujourd’hui on en arrive aux finitions.

Comme la tendance est à l’authenticité et au retour à l’état d’origine, des spécialistes sont venus étudier les traces des peintures anciennes et autres grimoires afin de pouvoir restituer le plus exactement possible la décoration intérieure… gothique.

Il y a une semaine, l’Adrienne a pu « jeter un œil » dans une des chapelles latérales où ce travail de décoration est terminé.

Et bien vous savez quoi? ça la laisse dubitative.

Elle a beau se dire « c’était comme ça, avant! », ça ne la convainc qu’à moitié.

Exactement comme si vous remettiez en technicolor les temples grecs, sous le même prétexte.

Mais tout ça sans doute est affaire d’habitude: ne trouve-t-on pas merveilleux les murs des villas de Pompéi, Oplontis, Stabiae, avec leurs fresques colorées?

Bref, faudra s’y faire.

W comme Waterloo

C’est un programme d’aide aux vétérans de divers conflits, il s’appelle Waterloo Uncovered et du 22 juin au 15 juillet derniers il a permis à une vingtaine de vétérans de travailler avec des archéologues – c’est en association avec l’Agence wallonne du Patrimoine – sur le site de la bataille de Waterloo.

Vous vous étonnerez peut-être qu’on puisse encore y trouver des choses « intéressantes » deux cents ans après la bataille mais la réponse est oui.

Des restes humains, des restes d’animaux, des munitions… qui devraient apporter toujours plus de réponses sur le déroulement de cette bataille et surtout sur ses terribles circonstances.

Vingt mille morts en un seul jour… il a bien fallu les enterrer quelque part, n’est-ce pas?
Ainsi que les chevaux, les mulets… et les membres amputés. C’est qu’on est à la ferme de Mont-Saint-Jean, là où se trouvait l’hôpital de campagne des troupes anglaises.

Pour ceux que ça intéresse, le journal de bord de la campagne archéologique de 2022 est ici.

Question existentielle

Vous aussi probablement recevez de toutes parts des appels aux dons et vous non plus ne savez pas à qui ni à quoi donner en priorité, Amnesty, la Croix-Rouge, les aveugles, les réfugiés, les parturientes congolaises… et ces derniers temps le monde culturel agite lui aussi de plus en plus frénétiquement la cloche d’alarme.

Ainsi l’Adrienne vient de recevoir cet appel de son ancienne université pour l’aider à restaurer et conserver un incunable.

On est d’accord, ce livre est un fort bel objet et mérite certainement sa survie pour la postérité. C’est déjà un miracle qu’il soit arrivé jusqu’à nous, les bibliothèques ayant une fâcheuse tendance à brûler et si la combustion n’est pas spontanée, les armées d’envahisseurs s’en chargent.

(Entre parenthèses, c’est un des plus lointains souvenirs d’Henry Bauchau, il en parle dans L’enfant rieur…)

Bref, cet incunable est le fruit d’un projet ambitieux de Bernhard von Breydenbach et un des tout premiers « guides de voyage illustrés » (1486). L’itinéraire du voyage en terre sainte est donné en détail et pour les illustrations, Bernhard von Breydenbach a emmené un artiste hollandais, Erhard Reeuwijk (son nom est germanisé en Reuwich).

On peut y voir les villes traversées, les populations rencontrées, des animaux encore inconnus du public européen de l’époque, comme la girafe, et y apprendre des tas de choses sur les différents lieux, langues, alphabets, coutumes…

Le voyage a débuté le 25 avril 1483 à Rödelheim et la boucle est bouclée un an plus tard, en février 1484 à Mainz.

A Venise ils ont pris le bateau pour Corfou, Modon (Methoni, dans le Péloponnèse) et Rhodes jusqu’à Jaffa (Haïfa). Ils ont bien sûr visité des lieux bibliques comme Jérusalem ou Bethlehem, sont passés par le désert du Sinaï pour se rendre au monastère Sainte-Catherine puis sont revenus par le Caire et Alexandrie, ont pris un bateau sur le Nil jusqu’à Rosette et sont retournés à Venise pour rentrer en Allemagne.

Ouf 🙂

***

La photo d’illustration vient du site de la KULeuven – où on peut en voir d’autres – et montre la prof. dr. Lieve Watteeuw avec la vue de Jérusalem dans l’incunable Peregrinatio in Terram Sanctam.

Adrienne se réjouit

De nombreuses découvertes archéologiques récentes ont réjoui l’Adrienne, qui lit ces articles-là en priorité 🙂

D’abord un article du 28 mai à propos d’un site maya avec palais et pyramides – plus de détails ici – puis un autre, le 31 mai, sur la découverte en Égypte, à Sakkara, de nombreux sarcophages et statues de bronze.

Parmi les découvertes les plus importantes, il y a celle de la tombe d’Imhotep, l’architecte déifié.
Les contributeurs de wikisaitout vont avoir du boulot, au moment d’écrire ce billet on peut encore y lire « sa tombe n’a pas été retrouvée » 😉

Maintenant il reste juste à espérer que l’un ou l’autre pays voisin n’ait pas l’idée d’envoyer des tanks et des bombes pour ratiboiser toutes ces merveilles, comme l’a récemment suggéré le ministre russe Lavrov, qui suppose que si on « interdisait le français en Belgique », c’est exactement ce que feraient les Français: venir zigouiller du Belge.

Mais vous l’aurez sûrement entendu vous aussi, amis français, il paraît que ça a passé au JT sur vos chaînes télé.

Et non, un tel raisonnement édifiant ne pouvait pas attendre jusqu’au 23 et la rubrique Stupeur et tremblements

V comme von Stackelberg

C’est tout de même incroyable, se dit l’Adrienne, cette désinvolture, cette évidente facilité avec laquelle certains s’approprient les biens culturels d’autres, pour leurs propres musées et pour leur propre commerce, et ceci non seulement dans des régions lointaines auxquelles on se croit supérieur, mais aussi en Europe et jusque dans ce fameux « berceau » de notre civilisation qu’est la Grèce!

Stupéfaite, oui, une fois de plus 😉 de constater que chaque expédition archéologique en Grèce, jusqu’au 19e siècle, a agi de cette façon: on y va, on prend ce qui est transportable, on revend ce qui a de la valeur marchande.
Comme c’est « à la mode », on n’a aucun mal à trouver des musées et des particuliers prêts à y mettre le prix.

C’est donc aussi ce qui est arrivé à Bassae, avec une « expédition » – qui était une sorte de « Grand Tour » – organisée principalement par des Britanniques et à laquelle participait Otto von Stackelberg, qui a fait de merveilleux dessins qu’on peut voir ici, comme l’illustration ci-dessus.

Pour ceux que ça intéresse, la biographie de von Stackelberg et des infos sur l’expédition sont ici.

Détail frappant – mais est-ce un détail? – les Grecs vivant sur place aux alentours de Bassae, font à tous ces gens qui viennent les dépouiller de leurs « antiquités » et autres « vieilles pierres », le meilleur accueil.

Von Stackelberg raconte dans son journal comment le dimanche, bergers et bergères viennent chanter dans le temple d’Apollon – reconnu par l’Unesco depuis 1986 – accompagnés de la lyra et danser le syrto de la région: hommes et femmes dansent ensemble mais ne se touchent pas, ils forment une ligne en tenant à la main une longue bande de tissu qui, pour von Stackelberg, est un rappel du fil d’Ariane.

E comme Escape Room

La mythologie dont il était question dans le billet d’hier est aussi très utile quand on n’a aucune trace écrite de son histoire et par conséquent aucune réponse à certaines questions comme celle-ci:

– Mais comment ont-ils fait, demande Jef, pour transporter jusqu’ici des pierres d’un tel tonnage et les poser les unes au-dessus des autres pour construire des murs si énormes?
– Et bien, rigole le guide, Persée a fait bâtir cette forteresse avec l’aide de ses amis les Cyclopes. C’est d’ailleurs pour ça qu’on les appelle des murs cyclopéens.

Mais Jef, ça ne le fait pas rigoler et il grogne en néerlandais:

– Ouais, comme ça, c’est facile.

Jef c’est le mec qui veut toujours savoir exactement combien, quand, quelle longueur, quel poids, quelle hauteur, quelle distance.

Le guide poursuit la visite, parle du puits et de la source permettant de soutenir un siège sans manquer d’eau potable, puis montre l’ouverture de la photo ci-dessus:

– Et là vous avez une possibilité de sortie, en cas de siège, parce qu’elle est invisible pour l’assiégeant.

Mais Jef, évidemment, n’en croit rien.

***

photo prise à Mycènes le 28 avril.

D comme Doriens

Rien de mieux que la mythologie pour tout expliquer – les saisons, la course du soleil ou de la lune, les fleuves et les sources… – et surtout pour se donner un bel arbre généalogique remontant jusqu’à des origines divines.

Prenez les Doriens: ils sont les descendants de Héraclès, qui lui-même est fils de Zeus.
N’est-ce pas magnifique 😉

Et ainsi, de roi légendaire en roi légendaire, on arrive à Ménélas, roi de Sparte, l’un des nombreux prétendants de la belle Hélène, fille de Zeus et Léda, sœur des Dioscures, ses protecteurs.

Tous les événements s’enchaînent, les dieux se mêlent de tout, l’oracle fait les prédictions nécessaires qui finissent toujours par se réaliser, quoi qu’on entreprenne pour s’en préserver.

Bref, les humains de toute éternité s’agitent beaucoup, s’entre-tuent, pillent et volent, meurent riches ou pauvres, en traîtres ou en héros et vivent « ce que vivent les roses, l’espace d’un matin »

Avec ou sans armure de bronze, comme celle de la photo prise au musée de Nafplio et qui date du 15e siècle avant notre ère.