On est sans doute toujours le con de quelqu’un, surtout si ce quelqu’un appartient à un groupe plus influent, plus puissant, plus nombreux. Le grand se moque plus du petit que l’inverse, ou en tout cas plus ouvertement, plus bruyamment, moins subtilement.
Depuis les années 80, le Français de base a découvert que le Belge était le con qu’il lui fallait. Au 13e siècle, c’était le Breton.
La cible idéale, c’est le con qui ne parle pas tout à fait comme moi. Ça me permet de me moquer de son accent et de son vocabulaire: si son parler est différent du mien, il doit forcément être plus bête que moi, puisque je suis la norme (1).
Ce Breton bretonnant du 13e siècle s’appelle déjà Yvon. Et quand on narre la crucifixion « à la mode de Bretagne », Marie-Madeleine s’appelle « Marie Mauvaise haleine ».
Une étude sur les « heurs et malheurs » des Bretons arrivés à Paris à l’époque de saint Louis est consultable ici (2)
Le texte anonyme du 13e siècle est d’un intérêt sociologique et linguistique. Il s’agit de deux grands fragments satiriques dont on peut en lire un ici (3)
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(1) Comme disait mon père à un Français qui commençait à l’énerver avec ses remarques sur son accent: « C’est vous qui avez l’accent! »
(2) Les premiers immigrés. Heurs et malheurs de quelques Bretons dans le Paris de saint Louis, Jean-Christophe Cassard, 1984. http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/medi_0751-2708_1984_num_3_6_958
Sur l’origine bretonne du mot balai: http://www.cnrtl.fr/etymologie/balai
(3) Le Privilège aux Bretons, en lecture ici: https://www.yumpu.com/fr/document/view/17213209/mimes-francais-du-13e-siecle-textes-notices-et-glossaire/23

je sais que c’est la 3e fois que je publie cette photo 🙂