V comme vitres

Vitrine de boulangerie, de magasin de mode ou de café-brasserie, il faut bien les choisir, sous peine de voir sortir un gérant furibard ou même – oui, c’était arrivé – que quelqu’un appelle la police.

Pourtant Amir a besoin de temps en temps de vérifier à quoi il ressemble.

Quel mal fait-il, en se regardant dans la vitre-miroir d’un magasin?

– Là je ne risque rien, se dit-il, on ne va tout de même pas croire que je veux piquer un vieux téléphone?

Il se rapproche, s’examine la barbe, sent sa propre odeur corporelle… et il espère que ce soir-là il aura enfin l’occasion de prendre une douche.

Vitre sale et rideaux toujours fermés, c’était doublement un crime contre la transparence obligatoire.

Oui, on a des rideaux, mais on les laisse ouverts, même quand la nuit est tombée et la maison éclairée de l’intérieur.
Le grand principe, c’est: « Nous n’avons rien à cacher »

Si en plus on laisse s’installer la poussière…

Non, il faut agir!
C’est une question de moralité publique!

Ainsi fut dit, ainsi fut fait: on n’eut aucun mal à trouver des volontaires.

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La première photo est celle du jeu 431 de Bricabook, la seconde vient de cet article de LLB ici.

Merci à Joe Krapov pour sa consigne du 14 mars inspirée des Contes glacés de Jacques Sternberg

Stupeur et tremblements

Vous connaissez sûrement l’histoire du couscous canadien avec l’irascible épicier à qui Fernand demande du fromage de Hollande et de la morue d’Ecosse?

L’Adrienne a demandé à son épicier bio s’il avait de la lentille verte.

– J’en ai de deux sortes, dit-il, en paquet d’un demi-kilo et en plus petit format.
– Donnez-moi un paquet de cinq cents grammes a répondu l’Adrienne.

Ce n’est qu’arrivée chez elle qu’elle a constaté que ces lentilles françaises (voir la photo ci-dessus) étaient en fait… canadiennes!

Donc, résumons-nous: on ne prend plus l’avion parce qu’on veut sauver la planète puis on constate que le paquet de lentilles « a fait un beau voyage »… dans son sachet compostable 😉

Et pour boucler la boucle: le revendeur hollandais, sur son site, précise que ces lentilles s’appellent Dupuis 🙂

Ah! ils vont être contents, là-bas!

L comme luth

Assise à table où sont posés quelques livres de musique, elle tient son luth à deux mains. Un des livres est tombé à terre mais elle ne s’en préoccupe pas.

Elle ne regarde pas non plus le luth: elle est en train de l’accorder, son oreille et ses doigts lui suffisent.

Ce qu’elle regarde, ce qui la préoccupe, est de l’autre côté de la fenêtre: ce qui l’intéresse se passe dehors.

En face d’elle, une autre chaise, encombrée d’une épaisse étoffe bleue. Au pied de la chaise, un violoncelle.

Si ce regard est celui de quelqu’un qui attend un partenaire pour une séance musicale, il faudra libérer la chaise.

Si elle ne libère pas la chaise, ne ramasse pas le livre, c’est qu’ils feront autre chose que de la musique 🙂

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source de la photo ici (libre de droits) – pour ceux que ça intéresse, une vingtaine d’excellentes minutes par Daniel Arasse sur Vermeer.

O comme Obo

– Je lisais l’histoire des deux princes ashanti, Kwasi et Kwame, alors bien sûr j’ai pensé à ton père!

Mais Nana est une jeune fille qui aime que tout soit bien précis:

– C’est ma mère qui est Ashanti, répond-elle, mon père est né à Obo, il n’est pas Ashanti, il est Kwahu!

Résultat: l’Adrienne, par la grâce d’une seule réponse, se retrouve avec une foule de questions 🙂

K comme Kees

– Vous permettez que je vous demande ce que vous faites dans la vie? s’enquit la dame du B&B en s’adressant à l’homme assis une table plus loin.
– Mais je vous en prie!

C’est ainsi qu’à sept heures du matin, en prenant son petit déjeuner, l’Adrienne a eu droit à tout le curriculum du type – un Hollandais qui s’appelle Kees, ça ne s’invente pas! (1) – ainsi que celui de la dame du B&B, de son mari, de ses parents et de ses beaux-parents 🙂

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photo de « room with a view » prise le 8 mars après le coucher du soleil – le carré bleu gris à peine perceptible au bord en bas à gauche, c’est le toit de la vaillante chtite auto de l’Adrienne 🙂

(1) en patois flamand, Kees veut dire fromage – mais bien évidemment ce n’est pas la véritable étymologie de ce prénom très très hollandais 😉

H comme Hollande

Nederland wil af van bijnaam ‘Holland’

Nos voisins du nord font savoir au monde qu’ils ne veulent plus qu’on les appelle Hollandais ni qu’on appelle leur pays la Hollande, parce que ce nom ne recouvre pas l’entièreté du territoire et surtout parce qu’il fait penser à des sabots, des tulipes et des moulins à vent.

De bijnaam ‘Holland’ doet volgens de Nederlandse overheid teveel denken aan klompen, tulpen en windmolens. 

Ce sont pourtant ces images-là précisément que les mêmes autorités hollandaises (oups! pardon) et tout leur marketing utilisent sans cesse…

Bref.

En français, nous devrons uniquement dire les Pays-Bas (équivalent de Nederland, le nom officiel du pays), mais comment nommerons-nous les habitants?

article et source de la photo ici.

X c’est l’inconnu

2019-02-23 (1)_LI

« Comment servir de la meilleure musique à vos hôtes », titrait un article de journal vendredi dernier.

Voyons cela, se dit l’Adrienne, que le chapeau de l’article emballe déjà: « Het meest onderschatte ingrediënt bij een goede maaltijd? Dat moet de muziek zijn. », L’ingrédient le plus sous-estimé d’un repas réussi? C’est sûrement la musique. 

En effet, qui ne s’est jamais senti énervé ou irrité par certaines musiques au restaurant? 

D’autant plus emballée, l’Adrienne, que la personne interviewée est une spécialiste de la musique dite classique, qui a travaillé plusieurs années pour la chaîne classique flamande (Klara).

L’article est long, plein de conseils, d’exemples et d’anecdotes, mais de musique ‘classique’… point.

Jusqu’à la fin, au dernier paragraphe, où on peut lire ceci:

« En klassieke muziek, haar biotoop? ‘Wordt totaal niet gevraagd. Alleen voor de Leuvense Faculty Club, ’s ochtends, heb ik een lijst gemaakt, omdat de historiek van deze plek dat dicteert. Maar klassiek, vroeger het etiket van chic en rijk, wordt nu ­geassocieerd met dikke nekken, met onuitstaanbare mensen die in das en kostuum uit eten gaan. De tijden veranderen.’ »

Et la musique classique, son biotope? ‘On n’en demande absolument pas. Ce n’est que pour le Faculty Club de Louvain, en matinée, que j’ai fait une liste [classique], parce que l’histoire du lieu l’impose. Mais le classique, qui avait autrefois l’étiquette chic et riche, se trouve associé aujourd’hui aux grosses têtes, à ces gens insupportables qui se mettent en costume cravate pour aller manger. Les temps changent.’

Traduction de l’Adrienne, qui ne s’en est pas encore remise et essaie de se consoler avec un proverbe, « Onbekend maakt onbemind« , on n’aime pas parce qu’on ne connaît pas. Ou comme disent nos voisins hollandais: « Wat de boer niet kent, dat lust hij niet« .

Mais les temps changeront sûrement encore, Monsieur Neveu, qui n’a pas tout à fait vingt ans, se met en costume cravate pour aller au resto 🙂

photo prise au printemps dernier pour la réunion des anciennes élèves

D comme délation

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Celui-là même, qui depuis cinq ans est à la tête du parti d’extrême droite ayant fait son meilleur score aux dernières élections, celui-là même est cet ancien président d’un groupement d’étudiants ayant appelé les écoliers à dénoncer leurs professeurs tenant en classe des propos « de gauche ».

A l’époque il y a eu un tollé général et il a dû mettre une sourdine.

Mais comme toujours, c’est à force de répéter des atrocités qu’elles finissent par passer.
Son prédécesseur avait déjà lancé l’idée en 1989 et on peut lire ici que nos voisins du nord viennent de la reprendre en ce joli printemps de 2019. 

Carré noir, de Kasimir Malevitch

 

D comme decolletéportemonnee

decolletéportemonnee

Il est toujours amusant de constater comme nos voisins hollandais aiment les mots français, voyez ce « decolletéportemonnee » que le journal flamand a appelé « boezembeugel », ce qui veut dire à peu près la même chose 🙂

On y apprend que cette mini-pochette à mettre à l’intérieur d’un bonnet de soutien-gorge a obtenu le prix du public fin 2012 mais apparemment il n’est que pleinement commercialisé depuis peu.

Le mot a intégré le dictionnaire après avoir remporté 15 % des voix pour désigner le néologisme de l’année. La pochette est juste assez grande pour contenir une carte bancaire ou quelques billets, permettant de sortir en boîte et de danser sans avoir à se soucier d’un sac à main.

Bien, bien, me dis-je, mais je doute que ce soit vraiment invisible sous un léger vêtement, et certainement au moment de sortir discrètement mes sous de mon décolleté 🙂 

Et surtout, comme je fais sans sac à main, pour les clés de la maison? le carnet? le stylo? le mouchoir? le téléphone? 

info article et source de la photo © Hemaontwerpwedstrijd.nl    ici.

B comme bloemen

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« Dank u voor die bloemen » disait le pape Jean-Paul II chaque année à Pâques, et après lui son successeur également, rivalisant tous deux de multilinguisme.

La petite phrase est devenue si célèbre en Flandre et aux Pays-Bas qu’elle y est utilisée à tout propos. Surtout dans le mode comique.

Aussi, en se promenant dans Ostende dont tous les espaces verts sont ornés de chrysanthèmes blancs, violets et parme, l’Adrienne ne peut que penser « dank u voor die bloemen« 

Même si, paraît-il, le pape actuel remercie les généreux donateurs de fleurs en italien

photo prise le 2 novembre