
– Faut pas exagérer, râle le Major. Ce n’est pas parce que j’ai la voix un peu enrouée qu’il faut me regarder de cet air soupçonneux!
Il oublie que lui qui est habituellement si truculent et plein d’anecdotes savoureuses, s’exprime en ce moment par borborygmes et a constamment la larme à l’œil.
– Et puis c’est à cause de tout ce cirque, aussi! grogne-t-il en montrant les enfants venus fort nombreux d’Outre-Manche, tous avec leur poppy épinglé sur leur uniforme scolaire.
Tous sages et recueillis.
Pour rien au monde le Major n’avouerait son émotion, qu’il ira tout à l’heure noyer dans une bonne bière belge.
Une Mort subite, par exemple.
(vous aurez compris, chers lecteurs, que la tentation est trop forte et qu’il fallait la placer, celle-là 🙂 )
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photo d’illustration ci-dessus prise sur le site du musée d’Ypres In Flanders Fields

Par John McCrae — Scan of McCrea’s In Flanders fields and other poems, obtained from archive.org, converted to PNG and B&W, slight rotation, Domaine public, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=9677477
Le poème a paru en décembre 1915 et a été écrit suite à la deuxième bataille d’Ypres, au printemps de 1915, là où pour la première fois les Allemands ont utilisé l’arme chimique. L’inspiration directe en est probablement la mort d’un ami de l’auteur, le 2 mai 1915.
John McCrea n’a pas survécu à la guerre non plus, il est décédé en janvier 1918.
In Flanders Fields (Dans les champs de Flandre – traduction de l’Adrienne)
Dans les champs de Flandre poussent les coquelicots
Entre des rangs et des rangs de croix
Qui marquent notre place; et dans le ciel
Les alouettes volent, et continuent de chanter courageusement
Alors qu’on les entend à peine, en bas au milieu des canons.
Nous sommes les morts. Il y a quelques jours
Nous vivions, sentions l’aurore, voyions le soleil couchant,
Aimions et étions aimés et maintenant nous gisons
Dans les champs de Flandre.
Reprenez notre combat avec l’ennemi:
De nos mains qui faiblissent nous vous remettons
Le flambeau; qu’il soit vôtre, et portez-le bien haut.
Si vous manquez à votre parole envers nous qui mourons
Nous n’aurons pas de repos, même si poussent les coquelicots
Dans les champs de Flandre.
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écrit pour Olivia Billington avec les mots imposés suivants: truculent – exagérer – anecdote – borborygme – tentation – cirque – coquelicot
Merci Olivia!