E comme escaliers

La veille au soir avec une ancienne collègue, il avait été question de cette « obligation » de s’adapter aux nouvelles technologies sous peine de s’exclure d’un certain nombre de choses.

Le lendemain, on en a la confirmation immédiate à l’hôtel: le check-in se fait grâce à un code envoyé peu avant par whatsapp et pour le check-out il faut scanner un code QR affiché dans la chambre.

Les seuls membres du « staff » qu’on peut y croiser, c’est le personnel d’entretien.
Qui souffle et qui sue, parce que l’ascenseur est en panne.
Ou plutôt « out of order« .
Car on y fait aussi l’économie du multilinguisme.

« We are sorry for the inconvenience« , conclut le message whatsapp.
L’Adrienne est surtout « sorry » pour la femme de ménage, qui a trente marches d’escaliers à faire entre chaque étage.
Les monter, les descendre, les remonter, les redescendre…
Avec tout son barda et des paquets de linge sale.

***

photo prise à Bruxelles le 3 novembre, avec les rues piétonnières apparaissent les déviations pour piétons 😉

T comme téléphonez-mi

Mini-Adrienne était en visite avec le petit frère et les parents chez des amis de ceux-ci qui avaient un fils de son âge.
Pas encore dix ans à l’époque.

Un fils que les parents aimaient mettre en valeur de toutes sortes de façons, ce qui étonnait toujours beaucoup la petite.

– Vous voyez, disait la mère du petit Christian, il ne réussit pas à dire correctement le mot ‘décalcomanie’ mais il vous dit la formule de Mary Poppins d’une seule traite.

Et en effet, il en a tout de suite fait la démonstration.
Jusqu’à trois fois: Supercalifragilisticexpidélilicieux!

Il savait aussi chanter et a choqué mini-Adrienne en lui chantant « J’aime les filles« .
Qu’elle ne connaissait évidemment pas, et il faut croire qu’à pas-dix-ans elle avait déjà des idées bien arrêtées sur l’exclusivité en amour 😉

Bref, c’est au petit Christian et à son refrain « téléphonez-moi/téléphonez-mi » qu’elle a pensé en voyant l’arrière d’une fourgonnette anglaise sur laquelle on pouvait lire la question suivante: « How is my driving? » accompagnée d’un numéro de téléphone pour les plaintes et/ou les félicitations.

***

Et pour boucler la boucle: ce « how is my driving? » est… une décalcomanie.
Mais on peut supposer qu’aujourd’hui le petit Christian réussit à mieux dire ce mot-là que supercalifragilimachin 🙂

B comme bidouillons

Découvrez les coulisses de l’improvisation dit le journal La Croix et c’est exactement ce qu’ont fait Nadine et la mère de l’Adrienne.
Écoutez l’histoire et jugez-en vous-mêmes:

– Tu sais que je vais à la messe trois fois par semaine.
Le curé est un très vieil homme qui perd un peu la boule mais heureusement il connaît la messe par cœur et il la fait en vingt minutes exactement.

Donc mercredi dernier, le temps que je sorte avec mon caddie – oui normalement Marie-Paule me ramène en voiture mais là à cause du caddie plein, ça n’allait pas – donc j’étais encore sur le parvis quand Nadine est sortie de l‘église, tout en affaire :

– Le curé a oublié la clé dans la serrure du tabernacle ! qu’elle m’a dit.

Alors là, on ne savait pas quoi faire ! Si quelqu’un de mal intentionné allait la prendre ? Ou ouvrir le tabernacle ? Voler les hosties !

– Tu sais quoi, j’ai dit à Nadine, prends la clé et cache-la en-dessous de la nappe de l’autel.

Elle trouvait que c’était une bonne idée et on est reparties tranquilles.

A la messe suivante, Nadine n’était pas là parce qu’elle va aussi à une autre paroisse et comme personne ne réussissait à ouvrir le tabernacle, j’ai dit que la clé était sûrement sous la nappe.

Ils ont regardé mais ils ne l’ont pas trouvée.

– Bon et maintenant, qu’est-ce qu’on va faire ? a demandé Marie-Paule.

Elle avait dit au curé de consacrer quelques hosties de plus, parce qu’elle attendait du monde et comme il en restait tout de même pas mal à la fin de la messe et que personne ne réussissait à ouvrir le tabernacle, le curé a résolu le problème en les mangeant.

– En les mangeant ? demande l’Adrienne ahurie.

– Ben oui ! Les hosties qui restaient, ils les a toutes mangées ! Puisqu’on ne pouvait pas les mettre dans le tabernacle !

– Il a eu du mal, d’ailleurs, a-t-elle encore ajouté.

***

Merci à Joe Krapov pour sa consigne Les Conseils de « La Croix »  
En pages 6 et 7 de « La Croix magazine » se trouvent des petits articles, renvoyant à des sites web ou à des livres, dont le titre contient un verbe est à l’impératif.
1) Suivez-ces conseils, rassemblés ci-dessous et racontez-nous ce qui s’ensuit si vous les appliquez à la lettre (un par un ou plusieurs à la suite !)
2) ou développez, sous forme d’un article à votre sauce, ce dont il pourrait être question sous un des titres suivants :

Découvrez les coulisses de l’improvisation

W comme wallon

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image de la consigne du Défi du samedi – merci à Walrus!

Ce devait être au début des années septante quand le téléphone a été installé: les nouveaux voisins ne s’appelaient plus Albert et Julia et ils n’avaient pas le téléphone.

On avait quitté le numéro 17 et la rue de grand-mère pour une maison où mini-Adrienne ne s’est jamais sentie chez elle.

Mais on avait le téléphone 😉

Ainsi qu’une porte de derrière et une porte de devant.

Sauf que ni l’une ni l’autre n’était située à l’avant ou à l’arrière – vu qu’elles étaient toutes les deux sur les côtés – et que tout le monde utilisait la porte de derrière, même les visiteurs, alors que seule celle de devant avait une sonnette.

Bref, un jour le voisin frappe à la porte de derrière et demande s’il peut utiliser le téléphone.

Bien sûr qu’il peut.

Le brave homme parle si fort dans le combiné que dans la pièce d’à côté, on peut suivre la conversation.

Sauf que mini-Adrienne n’y comprend rien du tout.

– Allô? ici c’est Devlé-Chauvert! répétait-il.

– Pourquoi il dit Devlé-Chauvert? demande-t-elle à sa mère.

– C’est parce qu’il téléphone en Wallonie.

C’est ainsi que mini-Adrienne a appris trois choses: que le voisin, qui ne connaissait pas un mot de français, s’exprimait assez couramment en wallon, qu’il adaptait son nom de famille – Devleesschouwer – à son public, et que s’il était maigre comme un clou et crachait ses poumons, c’est parce qu’il avait travaillé dans le Borinage comme mineur de fond.

V comme vieille dame

Quand le matin de Noël le téléphone sonne chez l’Adrienne, elle décroche de sa voix la plus joyeuse, croyant souhaiter une bonne fête à sa mère.

Mais c’était la vieille dame.

C’est vrai qu’elle rappelle régulièrement depuis le 9 août et qu’elles ont ensemble à chaque fois à peu près la même conversation.

Mais qu’importe.

Ça fait drôlement plaisir.

***

Tous mes vœux de succès à une autre Vieille dame, celle de Bonheur du Jour!

Bravo pour cette centième 🙂

Question existentielle

Elle parle.
Elle parle.
Elle se plaint.

Des restrictions dans son quotidien.
De la fermeté des mesures.
Des sacrifices à faire.
Des compromis nécessaires.

Puis elle demande « et toi, comment tu vas? ».

Mais on peut tout de suite avaler sa réponse parce qu’elle enchaîne sans l’attendre.

Sur sa voisine hystérique « qui ne fait attention à rien ».
Sur ces papiers à remplir pour chaque petite sortie.
Sur le romarin qui a fleuri dans le jardin de son fils.
Sur la crème au chocolat qu’elle a mangée.

Et que la mode n’est plus aux vestes cintrées alors que ce sont précisément celles-là qu’elle a emportées.

Expliquez-moi: quelle est donc l’utilité du téléphone?

***

écrit pour 13 à la douzaine avec les mots imposés suivants: utilité – restriction – fermeté – hystérique – couchette – papier – avaler – romarin – compromis – sacrifice – cintrer – crème + le thème: téléphone.

C comme coup de fil

Ça avait commencé le mardi avec un petit mal de gorge dont on ne s’était pas inquiétée.

La nuit, il avait empiré, empêchant de dormir – non pas que le mal fût si intolérable, mais dans la tête on débattait de la grande question: que faire? Faut-il suivre les directives officielles « je suis malade, je reste chez moi et j’appelle le médecin » ?

Normalement, l’Adrienne doit être quasiment à l’article de la mort avant de faire appel à la Faculté – ou en tout cas totalement incapable de faire la classe.

Maintenant qu’elle est une paisible retraitée, le problème ne se poserait normalement pas, elle pourrait tranquillement rester chez elle, se reposer et attendre que ça passe.

Bref, elle décide d’obéir aux consignes et dès huit heures – l’heure d’ouverture du cabinet – elle téléphone au médecin.
Subit des musiquettes.
Entend de temps en temps une voix suave qui la remercie de sa patience et lui précise combien de personnes sont encore avant elle.

Finalement, voilà la secrétaire, à qui il faut expliquer les symptômes. C’est elle qui juge si oui ou non il faut une action immédiate. Adieu le secret médical.

Le symptôme ‘mal de gorge’ entrant dans la catégorie ‘danger’, elle lui dit que le médecin la rappellera.
Quand?
Impossible de le savoir.
Pas même si ce sera avant ou après dix heures ou plutôt l’après-midi.

Mais cela finit par arriver:

– Vous restez chez vous, vous prenez un antidouleur et si ça ne va pas mieux, vous me rappelez.

Vous voyez bien, se dit l’Adrienne, que j’aurais tout aussi bien fait de me taire?

Surtout que des antidouleurs, elle n’en prend pas non plus 😉

***

la photo date d’une paire d’année, à une expo, mais vu qu’il faut que je me repose, je n’ai pas cherché où ni quand exactement 😉

Premier téléphone

lakévio117

Souvent l’Adrienne repense à ce temps béni où le seul téléphone dans la rue était celui des voisins, Albert et Julia, chez qui chacun se rendait quand il fallait appeler un médecin d’urgence.

C’est à peu près la seule raison d’utiliser un téléphone, dans la rue de mini-Adrienne, vers 1968: pas question de faire du blabla, de discuter longuement – c’est cher, le téléphone, lui explique-t-on – d’y exercer son bagou de baratineur, d’y déverser des flots de paroles ou d’y tenir de grands plaidoyers.

Pour tout cela, on a le contact en face à face.

Qui permet la mimique, la gestuelle, les circonlocutions…

Et pour ceux qui habitent loin, demanderez-vous?

Même pour ceux-là, pas besoin du téléphone. Grand-mère Adrienne sait qu’elle les verra sans prendre rendez-vous.

Ils viendront le premier de l’an lui porter leurs vœux.

Ils viendront le dimanche de la Trinité, jour de la fête de la ville, voir le cortège (et manger des tartes).

Et le dimanche de la kermesse d’hiver.

Ils trouveront chaque fois porte ouverte et table bien garnie 🙂

***

écrit pour les Plumes d’Emilie – merci Emilie! – avec les mots imposés sur le thème ‘bla-bla’: CIRCONLOCUTION – BARATINEUR – TÉLÉPHONE – DISCUTER – BAGOU – PLAIDOYER – PAROLE – PIROUETTE.

L’illustration a déjà servi pour le jeu de Lakévio

W comme wangiri

lakévio117

La police municipale a son compte fb où les gentils flics de la ville annoncent avec humour l’endroit exact où ils installeront leur caméra cachée:

Chers habitants de X, si vous passez par la rue Machin le jeudi 27 février, veillez à être bien coiffés pour la photo et n’oubliez pas que la vitesse y est limitée à 30 km/h.

A côté de ces annonces-là, il y celles pour les chiens perdus ou les clés de voiture trouvées, ainsi que divers conseils relatifs à la sécurité. Le thème est à la mode 😉

C’est ainsi que l’Adrienne a appris un nouveau mot, wangirifraude, une forme de fraude téléphonique (qui est bien expliquée ici mais que vous connaissez sûrement, le mot est neuf, pas la chose)

Vous avez raté un appel, le numéro vous est inconnu mais vous rappelez quand même et ça vous coûte cher. Surtout si vous n’avez pas remarqué le préfixe étranger qui vous relie à la Guinée et si on réussit à vous tenir la jambe un looooonnnng moment.

Bref, le mot est japonais ワンぎり et signifierait quelque chose comme ‘couper le contact après une seule sonnerie’.

Une chose est sûre, ce genre d’arnaque ne risque pas d’arriver avec l’Adrienne, plus téléphonophobique tu meurs 🙂

***

la photo ci-dessus a illustré un devoir de Lakévio

pour écouter la bonne prononciation de wangiri, c’est ici.

G comme GSM

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Bon, les habitués le savent, certains même depuis 2008 puisque c’est alors qu’elle en a parlé pour la première fois, l’Adrienne est téléphonophobique.

Vous savez aussi que depuis avril l’Adrienne est entrée dans le 21e siècle.

Bon.

Vous avez dû remarquer que l’été est passé et qu’un léger besoin de chauffage se fait sentir.

Chez les gens normaux, on appuie sur un bouton ou on tourne à une mollette et hop! ça se met en route.
Chez l’Adrienne, il y a chaque fois matière à suspense.
Enfin, si on peut encore parler de suspense. Vous aussi avez déjà deviné la suite.

Donc, le week-end dernier, comme la température était assez brusquement descendue à 16°, l’Adrienne a décidé de mettre du chauffage. Las, l’engin a émis deux borborygmes puis a indiqué « F 22 », ce qui dans son langage – il faut bien sûr d’abord mettre la main sur le mode d’emploi de l’appareil – veut dire: manque d’eau ou manque de pression.

Bon.

Besoin d’un homme de l’art. Attendre jusqu’au lundi. Téléphoner à celui qui a déjà dû venir la fois précédente. Son numéro n’est plus attribué. Faire une recherche internet. Y passer une demi-journée. Téléphoner à l’installateur. Quelqu’un de la firme va rappeler. Quand? Aujourd’hui peut-être ou alors demain. Sans rire! Rester collée au GSM toute la journée. L’emporter même aux toilettes. Devoir le recharger toutes les quatre heures. S’il veut bien. Souvent il ne veut pas. « En charge sur le secteur », affiche-t-il, ce vilain menteur, alors que le niveau de batterie continue de baisser.

Bref, l’Adrienne rame et n’a pas chaud… 

(d’où l’illustration, prise à Ostende, et qui a déjà servi pour un billet consacré à l’artiste et à l’expo inspirée du Radeau de la Méduse ;-))