E comme escalier

Il y a des jours où la seule activité « sportive » de l’Adrienne consiste à monter et descendre les quinze marches de son escalier – oui, quinze, elle les compte chaque fois pour être sûre que pas une ne manque – alors ces jours-là, soit elle est optimiste et se dit « heureusement que je ne me suis pas acheté un appartement, avec l’escalier je fais ma ‘cardio’ quotidienne », soit elle est réaliste et se dit « le jour viendra où… »

Bref, ça lui occupe autant la tête que les jambes 🙂

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Texte écrit avec le mot ‘escalier’ de la consigne proposée par Joe Krapov, merci à lui!

Photo prise en fin de parcours dimanche dernier.

Stupeur et tremblements

« Dire que quelqu’un n’est pas assez bien, c’est ne pas le regarder d’assez près« , lit l’Adrienne.

Sa première réaction est Oui! bien sûr! que sait-on des gens, rien qu’en les regardant passer? Et chacun ne vaut-il pas la peine d’être écouté, entendu, respecté?

ça semble tellement évident.

Puis elle pense à ses anciens voisins, et au nouveau « méfait » qu’elle vient d’apprendre sur leur compte.

Non seulement ils se sont rendus coupables d’un vol de 5000 € au petit commerce du coin – heureusement le propriétaire avait juste installé une caméra – mais en plus, ils se sont offert une « revanche » pour la plainte qu’il a osé porter: ils lui ont envoyé le contrôle sanitaire.

Alors l’Adrienne propose de changer la phrase et de dire: « il y a des gens qui ne sont pas des gens bien ».

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ça demande au moins un « shame! » n’est-ce pas 🙂

d’où la photo d’il y a quelques jours.

Pas de lien vers l’article ni de nom d’auteur, il m’est inconnu, ça vient du magazine le Vif (une mise en ligne du 20 mai) et je n’ai plus d’abonnement.

Le défi du 20

Fleurs des villes et fleurs des champs, cette fine fleur de la résistance de notre petite ville n’a pas survécu à son engagement. Certains sous la torture, d’autres fusillés, la plupart envoyés dans les camps.

Les noms de ceux qui ne sont pas revenus, gravés sur une plaque commémorative – une de plus! – où on dépose au mois de mai des couronnes de fleurs dans une tentative de « ne pas oublier ».

Y manquent – pour une raison inconnue de l’Adrienne – les cinq noms des jeunes gens tués les armes à la main en septembre 1944, dans une ferme d’un village d’à côté, à la veille de la libération.

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Pour le défi du 20 chez Passiflore – merci à elle – qui propose pour ce 20 mai le thème « fleurs des villes, fleurs des champs »

F comme fête!

« Le bon dieu est socialiste » disait le grand-père de l’Adrienne, à peu près chaque année, quand une fois de plus les festivités du premier mai se déroulaient sous un soleil radieux alors que la météo était triste le jour de la procession de l’Ascension, qui avait généralement lieu début mai également.

Alors chaque fois que la météo est grise et venteuse le jour de la fête de l’école catholique et fort clémente le jour de la fête à l’école « de l’État » – comme on appelle ici les écoles non-confessionnelles – l’Adrienne se redit en souriant la petite phrase du grand-père.

Cette année, le bon dieu s’est encore montré fort socialiste, les enfants de la petite école d’en face ont pu chanter et danser leur « tour du monde en musique » et même faire toutes les répétitions au grand air et l’Adrienne, qui jardinait, a pu chanter Aux Champs-Élysées et bouger le popotin sur la lambada, les deux seuls airs qu’elle connaissait 😉

Probablement la chanson la plus apprise en classe de FLE partout dans le monde 🙂

D’ailleurs c’est l’époque de l’année où Madame l’apprenait à ses 16-17 ans en vue de leur voyage à Paris, ils la chantaient en boucle dans le bus 😉

Adrienne est émue

La conversation entre Oksana et l’Adrienne était une belle preuve de ce que Madame avait précisément expliqué à la jeune fille désireuse d’apprendre le français en trois semaines: pour que « le message passe », il faut d’abord se lancer et oser se jeter pleinement dans une tentative de message.

C’est ainsi que belle-maman, qui n’avait peur de rien, réussissait à parler toutes les langues 😉

Oksana est Ukrainienne, donc la conversation s’est déroulée à l’aide de trois mots d’anglais, d’un peu de néerlandais, de beaucoup de ‘body language‘, de gestuel et d’une appli sur le portable.

– Si tu ne trouves pas le mot exact, expliquait Madame à la jeune fille, il ne faut pas que ça t’arrête: il y a toujours moyen de dire autrement, ce sera plus long, avec des mots plus simples, mais tu te feras comprendre. Rester la bouche fermée n’est pas une option!

C’est à l’aide de cette méthode qu’Oksana a réussi à raconter tout ce qu’elle avait à cœur de dire.
Son exil.
Son fils de douze ans.
Son talent pour la peinture à l’huile.
Son autisme.

Et qu’on a surtout vu son amour et sa fierté.

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Photo prise dans ma ville le 30 avril

X c’est l’inconnu

« Bourgeois forain » s’est exclamée l’Adrienne la première fois qu’elle a vu cette appellation accolée à un nom d’ancêtre.

Elle n’avait aucune idée de ce que ça voulait dire et pendant quelques minutes elle s’est plu à imaginer que l’ancêtre avait une attraction à la kermesse 😉

Mais non, bien sûr, il devait s’agir d’autre chose.

Si aujourd’hui « forain » a surtout un rapport avec la foire (la kermesse), il y a aussi une autre étymologie, à rapprocher de l’anglais « foreign », et qui signifie que la personne est de l’extérieur, d’une autre ville donc.

En néerlandais on les appelle buitenpoorters, littéralement « en dehors des portes » de la ville, puisque généralement elles étaient entourées de murs et fermées de portes.

Bref, la généalogie élargit aussi les connaissances en vocabulaire et en histoire.

Pour ce qui est des connaissances en droit fiscal (être bourgeois forain présentait des avantages fiscaux), l’Adrienne ne cherche même pas à savoir, elle est déjà très contente si elle arrive à remplir sans trop stresser sa propre feuille d’impôts, qui pourtant est d’une plate simplicité 😉

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Et pour ce billet on n’a pas résisté à l’envie de remettre une photo de la Tantine, qui aurait ces jours-ci fêté ses 59 ans de mariage

Le défi du 20

La salle où ont lieu les expositions était autrefois une usine textile, de sorte que la lumière est idéale: les toits pentus, tout de verre, sont exposés au nord.
Jamais de soleil direct et une luminosité qui dénature le moins possible les coloris.

Quand l’Adrienne y arrive peu avant l’heure d’ouverture, elle allume les écrans – vous connaissez des artistes contemporains qui n’ont rien à montrer sur ordi? – installe le fléchage et allume les lampes.

Puis se ravise: la salle est si lumineuse qu’on n’a vraiment pas besoin de gaspiller de l’électricité.

Arrive le premier artiste.
Le sculpteur.

– La lumière est bonne? lui demande-t-elle.

Il la trouve parfaite.

Arrive l’aquarelliste.

Elle veut qu’on allume.

Pourtant, ses aquarelles sont sous verre et font encore plus un effet de miroir avec la lumière artificielle.
Elle teste.
Un côté.
L’autre.
Recommence.

Puis donne raison: ça fait trop de reflets.

Un quart d’heure plus tard entre le peintre.

– Il fait trop noir! s’écrie-t-il. Il faut allumer!

Et vous savez quoi?

L’Adrienne, ça l’a bien fait rigoler: qu’ils se débrouillent entre eux, s’est-elle dit.

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Pas de photo des aquarelles sous verre qui font miroir et reflètent le décor mais une autre, prise à Aix, qui a aussi bien fait rigoler l’Adrienne – oui ça rigole beaucoup – quand elle a lu « ici peignait Cezanne » (1).

Le lieu n’est plus qu’un pâle reflet de ce qu’il était: il est aujourd’hui entouré de murs et de maisons de sorte que si on voulait peindre la montagne Sainte-Victoire, il faudrait une échelle 🙂

Merci à Passiflore pour son Défi du 20: en ce mois d’avril la consigne était Reflets.

(1) Cezanne lui-même écrivait son nom sans l’accent.

Question de titre

Les sculptures étaient des assemblages de bouts de bois ou de pièces métalliques et l’Adrienne – qui aime « comprendre » – allait de l’une à l’autre lire les titres des œuvres, espérant y trouver une clé pour les comprendre.

Mais la plupart avaient une étiquette « Sans titre » et une autre disait joyeusement « à vous d’en proposer un« .

Bon, s’est-elle dit, je lui pose la question idiote ou je me retiens?

Alors évidemment elle la lui a posée, vu qu’on pouvait supposer qu’il était venu là pour ça, l’artiste.

– Dites-moi, fait-elle en essayant de ménager les susceptibilités du créateur, quand vous réalisez une œuvre, vous partez d’une idée ou l’idée vous vient au fur et à mesure? … De façon presque organique, en quelque sorte? … Selon le matériau utilisé? … Puisque je vois qu’il y a beaucoup de matériel de récupération, non?

Avec après chaque point d’interrogation « un blanc », joint au regard interrogateur, pour lui laisser le temps de réagir.

Hélas, il ne réagissait pas.

Puis il finit par dire:

– J’aime bien voir ce que les gens proposent, comme titre.

Alors elle en a conclu que si ses œuvres sont « Sans titre« , c’est qu’il ne faut pas chercher ce qu’elles représentent 😉

Ce qu’il a en quelque sorte confirmé un peu plus tard en disant:

– On peut y voir ce qu’on veut, en fait!

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Par contre celui qui a fait le dessin en illustration ci-dessus savait ce qu’il représentait et ne laissait pas le choix du titre au spectateur 🙂

O comme ordalie

Il n’a pas eu besoin de faire passer l’Adrienne par l’épreuve de l’eau ou du feu pour émettre sa sentence 🙂

Mercredi matin, après les sourires, les ‘bonjour!’ et la petite conversation d’usage, au moment où elle allait poursuivre sa route, il l’a hélée, a fait un geste par derrière l’épaule en direction de là d’où elle venait et a dit:

– C’est beau, là, ton…, ta…, ce que tu as mis, là!

Il voulait parler de la clôture, elle l’a compris, une quinzaine de mètres venaient d’être rajoutés juste la semaine d’avant.

Alors elle l’a remercié et est repartie avec un sourire encore plus large.

La journée avait mal commencé, mais trouver le monsieur à longue barbe grise sur le pas de sa porte, c’est toujours un heureux moment.

« ordalie » avait été proposé par Walrus pour le défi d’un de ces derniers samedis 🙂