T comme Tantine

Chère Tantine

L’Oncle et toi faites partie de mes plus anciens souvenirs, et des plus forts.

– Tu viens avec nous? m’a demandé celui dont on venait de m’apprendre qu’à partir de ce jour-là, je devais l’appeler l’Oncle.

Pour toute réponse, je lui ai tendu la main. J’avais déjà confiance.

Je me vois encore, à cinq ans à peine, assise à votre table au Café Memling. La musique y était tellement différente de celle que j’entendais à la maison. Tout y était différent et mystérieux. A commencer par la fascinante collection de porte-clés accrochés au-dessus du comptoir et ce gros appareil que l’Oncle appelait un juke-box.

– Tu veux un coca? m’a-t-il proposé.

Je ne savais même pas ce que c’était mais j’ai fait oui de la tête.

– Avec une paille?

J’ai tout de suite aimé l’Oncle. Il n’avait que de bonnes idées 😉 

La boisson avait une couleur et une odeur bizarres – je ne connaissais que l’eau et la limonade jaune – mais je l’ai tout de même bue. A petites gorgées espacées, comme il sied à une enfant bien élevée. Juste un peu inquiète quand la paille a fait des gargouillis étranges au moment où la petite bouteille était vide. Mais personne ne semblait l’avoir remarqué.

Le coca au Memling, de préférence avec une paille, est devenu un rituel comme les aiment les enfants. Y compris les gargouillis.

J’ai aussi un souvenir du jour de votre mariage. Un seul. J’ai vu pleurer ma Tantine et j’ai voulu la consoler. Mais on m’en a empêchée, pensant à tort que ce n’était pas l’affaire d’une petite fille de cinq ans.

Pourtant, nous nous serions comprises. Tu n’avais que vingt ans et nous avions la même peine: nous venions de perdre un homme que nous adorions, ton père, mon grand-père.

Aujourd’hui l’Oncle et toi fêtez vos noces d’or. Voilà cinquante ans que je vous serre contre mon cœur.

 vive la famille

16 commentaires sur « T comme Tantine »

  1. Les petits bonheurs de l’enfance sont ceux qui nous laissent les plus jolis souvenirs. J’adorais quand mon grand-père m’amenait au bistrot et qu’à 4 ans, je racontais fièrement « je vais au bistrot ce matin »

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  2. Les oncles et tantes sont parfois précieux. Je me dis souvent que si je n’avais pas eu ma tante Odile, la sœur de maman, si différente! Elle savait montrer son affection, elle…
    J »ai beaucoup pensé à toi et à ton élève anorexique, Adrienne, j’espère que les parents seront attentifs à tes propos!
    Biz,
    lulu

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  3. Mon premier Coca, je l’ai reçu gratuitement dans la cour de l’Athénée Royal de Mons. Ils avaient déjà le sens de la pub à l’époque… j’avais également reçu une latte en PVC rouge avec leur marque. Elle n’a pas fait long feu : je l’ai brisée en faisant une démonstration synclinal / anticlinal à mon voisin au cours de géo. Trop rigides ces trucs américains !

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  4. Oui, c’est merveilleux : la magie de l’Oncle gentil, de la Tantine affectueuse… On est heureux de savoir que leur déjà long chemin leur a permis d’exercer leur talent pour le bonheur !

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  5. oui Elisabeth, ces souvenirs me sont revenus en réfléchissant au petit mot que je leur écrirais pour l’occasion 🙂
    c’est vrai, gballand
    elle est très photogénique, Berthoise 🙂
    les parents et les copines, tous sont mobilisés, ouf!
    merci Lulu
    rigides, Walrus, c’est le mot 😉
    merci Mme Chapeau, merci Captaine Lili
    l’oncle qui fait rigoler, indispensable, Marc 🙂
    c’est vrai, Myosotis, ils ont le don du bonheur, c’est le mot exact (parce que – pour le dire avec un gros cliché – la vie ne les a pas épargnés)
    merci et bonne soirée à tous!

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  6. Mon premier coca, s’était aussi une occasion un peu spéciale mon grand-frère et moi nous avions fait une petite sortie rien que tous les deux, j’avais 8 ans et lui 20 et il voulait m’annoncer son mariage ( un peu précipité)…
    C’était la seule et unique sortie rien que nous deux et j’en garde un souvenir magique, depuis j’adore le coca !!!

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  7. J étais chez mes Tantes à Soignies, et un type de la firme coca faisait du porte à porte pour distribuer des échantillons. Il voulait reprendre les consignes, alors on a mis le coca dans des bouteilles de lait vides et propres. Comme j étais le seul qui aimait cela j en ai bu pendant le restant de la semaine. Mes Tantes vivaient à trois dans leur maison, pas trouvé de Mari après la guerre 14-18.
    Bonne journée Adrienne
    Latil

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  8. je me souviens, tu as déjà parlé de ces trois tantes restées célibataires à cause de la guerre…
    ce qui me frappe c’est que beaucoup parlent de leur découverte du coca, c’est amusant 🙂
    merci et bonne soirée à tous!

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