La semaine dernière, un article dans la presse flamande faisait part du mécontentement de quelques privilégiés ayant un appartement avec vue sur mer, à la côte belge… mais qui sont situés au rez-de-chaussée.
Que vaudra encore notre appartement, se lamentaient-ils, si notre vue sur mer est bloquée par des tas de sable?
A ça l’Adrienne avait envie de répondre que si le niveau de la mer monte ne fut-ce que de deux mètres, leur appartement vaudra sûrement encore moins, puisqu’il sera englouti 😉
Le « ça » est illustré par une photo prise depuis la plage d’Ostende, où on ne voit que des appartements et les 34 étages de la tour de l’Europe (Europacenter).
On y explique que la parade trouvée pour contrer l’engloutissement total de la digue côtière, c’est principalement de refaire des dunes…
Ou pour parler comme les (mal)heureux propriétaires d’appartements avec vue sur mer: « des tas de sable » 🙂
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Maintenant, si on veut encore voir des dunes aux environs d’Ostende, il faut faire la promenade à pied d’Ostende à Bredene, ce que l’Adrienne va faire après-demain, pour rendre visite à sa dernière tante (qui n’est même pas sa tante mais le cœur compte plus que les papiers, n’est-ce pas ;-))
« J’ai vécu jusqu’à mes dix-huit ans dans un petit village d’Ardenne où mon imagination se trouve encore. Que je le veuille ou non, tout ce que j’écris vient de là: des quelques mètres carrés du hangar à poules de Papou, de l’odeur des fraises qu’il cultivait derrière l’église, face aux collines de Hoyemont, au-dessus de l’Ourthe et de l’Amblève, […] des bêtes sachant d’instinct trouver le bonheur, des machines agricoles défoncées par l’usage, dans le purin. »
Antoine Wauters, Le plus court chemin, éd. Verdier, 2023, p.9 (incipit)
« Je ne crois pas en la prédestination. L’idée ne me plaît pas. Mais j’ai tout de même parfois l’impression que certains d’entre nous ne peuvent pas faire autre chose que ce qu’ils font. Comme si c’était écrit. Bien que cela ne le soit pas. »
idem, p.31
« Et plus tard, les livres, la ville, les films. Et ces centaines de voix nouvelles glanées au musée du Cinéma, chez Tropismes, à la bibliothèque de l’université, partout, comme un dingue. Je lis et regarde tout ce que l’enfance n’a pu me donner. A la bibliothèque, ce sentiment étrange: je me sens chez moi. Je me sens bien. L’odeur du papier me parle. C’est la voix du souvenir. »
idem, p.35
« Une vie placée sous le signe d’un Dieu représenté par des curés, omnipotents et profiteurs, qui mangeaient indifféremment sur le dos des morts, des jeunes mariés, des communiants, des baptisés. Et des morts et des morts encore. Une vie placée sous le signe d’une nature immense, de kermesses à répétition, d’alcool et de ce bienheureux ennui dont je me sens si souvent orphelin aujourd’hui. »
idem, p.41
« Dans ce royaume des doux, le périmètre de la culture, c’était le dictionnaire Larousse, qui était le seul à répondre aux questions qu’on se posait. Pas d’ordinateurs. Pas de téléphones savants. On se débrouillait comme on pouvait. […] On usait nos habits jusqu’à la corde et, une fois anéantis, on les voyait se transformer en loques à poussière. »
idem, p.71
« De Mémé, j’aurais aimé conserver la statuette de saint Antoine. Je la lui avais ramenée de mon Erasmus à Padoue. Saint Antoine était son saint préféré, au point que je la soupçonne d’avoir égaré des objets exprès, pour pouvoir le prier davantage. Quand il ne l’aidait pas, Mémé tournait la statuette, face au mur, de manière à n’en voir que le dos. Elle ne voulait plus en entendre parler. Jusqu’à ce qu’elle remette la main sur ce qu’elle cherchait. »
idem, p.84
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Et p.59, l’explication du titre:
« Puis un matin, écrit Joan Didion, j’ouvrirai simplement mon carnet et tout sera là, compte épargne oublié avec les intérêts cumulés. Péage de retour vers le monde d’alors. Tout reviendra. » L’écriture comme un raccourci. Oui. L’écriture comme le plus court chemin.
Bien sûr il a d’abord fallu enquêter pour constater que la solitude ne touche pas que les personnes âgées.
Et que généralement elle ne se voit pas.
Il faut donc la détecter: pendant les trois prochaines semaines, elle va nous apprendre à décrypter les signes indiquant qu’une personne souffre de solitude.
Comme elle est en même temps ministre de la santé publique, elle fait d’une pierre deux coups: car il lui a été soufflé dans le creux de l’oreille que la solitude, si elle se prolonge, peut devenir la cause de divers maux physiques et psychiques.
Avouez que c’est merveilleux d’efficacité!
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Merci à Monsieur le Goût pour son 183e tableau dont la consigne était « Dites la solitude »
On devrait s’en douter parce que ces dernières années c’est chaque fois pareil: à peine s’est-on souhaité une bonne année et une bonne santé que les catastrophes arrivent.
Déjà dans le train de retour de Paris, un TGV avec 45 minutes de retard, comme il se doit dans le sens France-Belgique 😉 donc on s’inquiète de savoir si on va pouvoir sauter sur le dernier train pour rentrer à la maison.
C’est là que le stress augmente: on lit sur le site de la SNCB que des trains sont annulés pour cause de rails sous eau.
La traditionnelle lettre de Nouvel An que les enfants lisent le matin du premier janvier à leurs parents, grands-parents, parrain et marraine, reste une tradition parfaitement respectée par chez nous, même si elle demande beaucoup plus de « flexibilité » qu’avant, de la part des instituteurs et institutrices, vu la complexité de si nombreux ménages recomposés et décomposés.
La photo d’illustration montre la lettre de Nouvel An adressée aux parents d’un petit enfant de six ou sept ans maximum, qui l’a perdue dans le bus quelque part entre Saint-Trond, Landen ou Gingelom, le dernier vendredi avant les vacances de Noël.
Quand le chauffeur l’a trouvée, il a publié un appel avec photo – et même une vidéo où il lit la lettre – dans l’espoir de pouvoir la rendre à son auteur et à ses destinataires.
Bien sûr, tout ça a fortement remué les réseaux sociaux et même la presse, on adore ce genre de conte de Noël, n’est-ce pas, et on s’est tous mis à espérer que le brave chauffeur de bus reçoive une réaction favorable à ses appels 🙂
A ceux qui en douteraient: mais oui, il y a des gens formidables et de nombreuses bonnes actions ont lieu chaque jour 🙂
Voyez par exemple ce qui est arrivé à une école maternelle et primaire de Zelzate: un généreux donateur anonyme lui a offert des jouets et du matériel pour une valeur de 25 000 €.
Il ou elle l’a acquis à une vente publique et a déboursé 8000 €.
« Les enfants en sont restés bouche bée quand ils ont découvert ces tas de jouets le lendemain matin », dit la directrice, qui a dû chercher en toute hâte un camion et un chauffeur pour aller récupérer les dons avant 22.00 h. dans la ville assez éloignée où la vente publique avait eu lieu.
L’Adrienne a été bien étonnée de voir un appel à témoins dans la presse francophone du pays avec la question suivante: Quels corps de métier sonnent à votre porte pour recevoir des étrennes?
Bien étonnée, oui, parce que ni pendant son enfance en ville ni pendant son âge adulte à la campagne ni depuis son retour en ville, jamais on n’a sonné ni à sa porte, ni à celle de ses parents ou grands-parents pour avoir des étrennes.
Par contre, on ne manquait jamais de calendrier, impossible de refuser cela au facteur, au pompier, au petit scout, à la Croix-Rouge…
Vérification faite, il semblerait que seuls les éboueurs aient le droit de faire du porte à porte pour demander leurs étrennes mais vraiment, par ici c’est du jamais vu.
Depuis le covid, les seuls à passer encore avec un calendrier sont les pompiers et pour qu’il n’y ait aucun contact 😉 ils le glissent dans la boîte aux lettres et espèrent qu’assez de personnes verseront les 5 € qu’il coûte… ou verseront un peu plus, par sympathie 😉
Donc depuis ces dernières années, l’Adrienne suppose que ce nouveau système leur donne satisfaction, puisqu’ils continuent de le faire: le calendrier était dans sa boîte le 26 décembre 🙂
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En illustration, une des photos du calendrier 2024 avec les pompiers dans leur tenue d’apparat qui date du 19e siècle 😉
Il y a une chose un peu bizarre dans notre petit pays aux trois langues et aux régions si bien régiona-fédéralisées 😉 que nous savons à peine ce qui se passe de l’autre côté de la frontière linguistique et que tout en nous croyant uniques nous faisons la même chose.
Ainsi par exemple côté flamand nous sommes très fiers de notre « Warmste week » (la semaine la plus chaleureuse) et sans doute côté francophone l’est-on tout autant de « Viva for life« .
Cette année côté flamand la thématique était « opgroeien zonder zorgen« , grandir sans soucis, et côté francophone la pauvreté enfantine: vous le voyez, même les thèmes étaient similaires.
Partout dans le pays toutes sortes de gens se mobilisent, l’ancienne école de Madame a aussi organisé des actions pour récolter des fonds, et on peut constater que les gains totaux sont du même ordre également, plus de huit millions d’euros de part et d’autre.
Et avec une infime partie de ces sous, l’organisation qui envoie des bénévoles aux enfants comme Alexandra pourra continuer d’exister 🙂
D’ailleurs justement aujourd’hui c’est notre brunch de fin d’année, ce qui veut dire que Madame va aussi revoir le petit frère d’Alexandra 🙂
Dans ce même registre rédigé au début de l’année 1581, celui contenant les actes de succession et les règlements d’héritages – celui dont il était question hier – un autre petit texte préliminaire s’adresse au lecteur du futur, « tot den leser » pour faire le triste bilan de l’année écoulée.
Car il n’y a pas eu que ce tremblement de terre du 6 avril.
Il y a aussi les guerres de religion – la ville se trouve à une frontière qui voit passer toutes les armées, c’est l’époque d’Alexandre Farnese, l’envoyé de Philippe II d’Espagne – et il y a eu une épidémie de peste qui n’a, écrit-il, épargné que peu de maisons: « alwelck luttel huysen binnen deser stede vrij ende exempt ghegaen zijn »
Et contrairement aux privilégiés de la peste à Florence en 1348, qui ont pu jouir en toute quiétude de leur villégiature à la campagne, la peste par ici n’a pas épargné les notables: le juge/notaire déplore la mort de ses quatre collègues, qui ont donc, dit-il, dû être remplacés prématurément: « mids der doot voorseit« .