B comme Bienvenue au club!

– Alors ? fait Pierre en direction de Muanza, dès que la voiture a quitté le chemin de campagne pour s’engager sur la voie expresse. Alors ? Quelles sont tes impressions ?

Marie le voit soulever ses sourcils et se frotter l’aile du nez avec l’index et le majeur.

Elle se souvient de la première fois où elle-même a assisté à un repas dans sa belle-famille. Réunion conviviale, certes, à condition de passer outre la morgue de frère aîné, l’arrogance de beau-frère n°1, qui méprise ses propres ouvriers et l’orgueil immodéré de mémé Jeanne pour tout ce qui touche à ses enfants et à ses talents culinaires.

– Tu as aimé ce qu’on a mangé ? demande Marie, sûre qu’à cette question-là, Muanza trouvera plus facilement une réponse.

– Oh ! oui, tout était excellent ! Mais j’ai l’estomac qui va exploser !

C’est ainsi : mémé Jeanne n’est satisfaite que si on se ressert deux fois de chaque plat, sinon elle feint de croire qu’on n’apprécie pas les efforts qu’elle a fournis en cuisine. Il vaut mieux éviter la confrontation.

– Tu comprends maintenant pourquoi je t’avais conseillé de manger lentement, dit Marie en riant. Il faut absolument éviter le plus longtemps possible d’avoir une assiette vide.

– Je mange trop vite, dit Muanza avec une touchante humilité, je sais, c’est un gros défaut. Et puis de si grosses parts de gâteau…

– Moka crème au beurre, dit Marie, sa spécialité ! Son gâteau fétiche !

– Je n’en voulais plus une deuxième part, alors elle m’a dit : « Il n’est pas bon, peut-être ? »

– Bienvenue au club, dit Marie en riant. Nous allons créer une confrérie. Pierre n’y entrera pas, par contre !

– Ma mère, explique-t-il, n’aime pas la tiédeur des sentiments quand il s’agit de sa cuisine. Alors ma tactique c’est de manger ce qui me plaît et de refuser systématiquement les desserts.

– Mais ne te fais pas d’illusions, conclut Marie : seul Pierre a le droit de refuser.

 

muanza,jeu,fiction,vive la famille

écrit pour Désir d’histoires n°130
avec les consignes suivantes:
soutien – famille – convivial – repas – réunion – confrérie – confrontation – humilité – orgueil – arrogance – mépriser – morgue – autopsie – trouver – réponse
Soit vous prenez tous les mots, soit vous n’en sélectionnez que cinq et vous ajoutez la consigne suivante: un des personnages doit dire « je n’aime pas la tiédeur des sentiments ».

 

muanza,jeu,fiction,vive la famille

c’est la photo de http://www.lesrecettesderatiba.com/article-gateau-moka-praline-100734384.html qui colle le mieux au texte
Cool

28 commentaires sur « B comme Bienvenue au club! »

  1. J’ai connu ce genre de situation, à maintes reprises. Et j’avoue que j’ai repris le flambeau de ma mère : quand un de mes hôtes ne se ressert pas d’un plat, j’ai le sentiment qu’il boude ce que j’ai préparé et que je n’ai pas su satisfaire son goût 😀

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  2. Mémé Jeanne ou pas, tu ne me feras pas manger de Moka crème au beurre. Rien qu’à entendre le nom, j’ai des spasmes biliaires. 😉

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  3. (presque) pareil pour moi, Berthoise, j’en ai des hauts-le-coeur 😉
    j’en parlais encore hier avec ma carissima nipotina, Olivia, toutes les mêmes, apparemment 😉
    pour lui faire plaisir, Caro? 🙂
    merci et bonne journée à tous!

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  4. je connais aussi parfois ce genre de repas trop copieux et surtout l’insistance d’une mémée, fière et heureuse de faire partager sa cuisine, disons que nous en avons toutes une dans une famille

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  5. C’est une manie de mère, c’est certain !
    La mienne nous gavait de la sorte.
    Quant à moi, je ne peux m’empêcher de compter très large quand j’ai du monde à nourrir mais je n’oblige quand même pas les gens à manger.
    Pour le gâteau au beurre … non non sans façon, je n’ai plus faim !
    Blurp !

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  6. C’est certain, la fllibust, que la plupart du temsp ça part d’une très bonne intention (comme les pavés de l’enfer LOL)
    je fais pareil, Loulou, j’ai normalement des restes pour deux ou trois jours, mais je ne force personne à se resservir, j’en ai trop souffert moi-même pour l’infliger à d’autres 😉
    merci et bonne journée!

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  7. Ton histoire me donne la nausée: j ai connu cela. Un jour j ai fourré une part de gâteau à la crème dans la veste de mon costard!
    Amicalement Adrienne( On a besoin de toi pour authentifier un tableau, les expertes semblent éprouver des difficultés)
    Latil

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  8. Ah je connais aussi ce type de repas, mais de mon côté j’ai développé une tactique de défense, je prends de la sauce et je l’étale bien sur l’assiette, comme ça on pense qu’elle est bien remplie et ça permet de déguster de tout sans exploser !

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  9. trop fort, Latil!!! et ta femme, qu’en a-t-elle pensé, de ce gâteau à la crème dans une poche de ton veston? (vraiment tu m’as fait rire!!!)
    je crois que nous avons tous nos « trucs », Martine27 (le mien n’est pas très bon, j’essaie de manger le plus lentement possible mais l’assiette finit par se vider, n’est-ce pas ;-))
    merci à tous et bonne fin de journée!

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  10. Mais si on tarde a vider son assiette pour ne pas avoir droit à une autre, on peut aussi s’entendre dire que l’on aime pas le plat, ça m’est déjà arrivé souvent moi qui mange très doucement 🙂

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