Stupeur et tremblements

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Pour mieux se fondre dans la foule parisienne, William Willoughby Junior s’est acquis un béret basque. Il s’étonne d’en voir si peu dans les rues et sur les grands boulevards mais en conclut que tous ces promeneurs plus ou moins pressés ne sont sans doute pas de vrais Parisiens. 

Il a bien préparé son voyage, il possède quelques rudiments de français et un discret glossaire qui malheureusement ne l’aide pas beaucoup au restaurant. Onglet? Tartare? Tripes? Tout ça ne s’y trouve pas et le serveur, un grand moustachu chauve, s’amuse à l’embrouiller encore plus en lui donnant des explications compliquées avec un débit de fusil mitrailleur. 

De l’autre côté de la nappe à carreaux, un gros type oublie de fumer sa cigarette, tellement il est atterré par les mauvaises nouvelles de ce samedi 26 octobre. Lui aussi découvre avec stupéfaction des mots inconnus, krach, brokers, Dow Jones… et sent confusément que le monde va changer, et la peur du pire lui prend le ventre. 

Pendant ce temps, près de la fenêtre, miss Susan Walker – des Walker de Baltimore – les premiers émois passés, se dit qu’il serait peut-être plus prudent de vérifier le pedigree du fringant jeune homme qui lui baise les doigts et la tient constamment sous la langueur de son regard, avant de s’engager plus loin avec lui. 

Elle ne sait pas encore que depuis deux jours, ce presque sans-le-sou est plus riche qu’elle. 

*** 

photo offerte à l’inspiration chez Lali
que je remercie!

25 commentaires sur « Stupeur et tremblements »

  1. Ach ! 1929 ! Quel gross malheur ! 😉
    Excellente exploitation d’une très chouette image. Et je m’amuse du rapprochement de nos démarches : cet après-midi j’emmène le comte Krapov à Paris en 1925 pour les impromptus !

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