Madame est allée voir sa « doctoresse » préférée, celle qui est une charmante ancienne élève à qui elle a délégué la responsabilité de veiller à ce qu’elle ne meure pas du même mal que son père.
– Je compte sur toi, lui a-t-elle dit.
Même si évidemment il faudra bien qu’elle meure de quelque chose.
Puis c’est la secrétaire qui s’est occupée d’elle et comme une des questions était « vous prenez des drogues? » Madame n’a pu s’empêcher d’éclater de rire et – vous la connaissez – de s’étonner:
– Est-ce que vraiment vous pensez que les gens vous répondent la vérité, quand vous leur posez ce genre de questions?
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Bref, le plus beau de l’histoire, c’est que ces questions sont inutiles: la prise de sang révèle tout.
Sur une des étagères de la cuisine, l’Adrienne a un petit pot contenant une poudre blanche (oui, riez :-)), cadeau de beau-papa, ainsi que ses recettes de charcuterie artisanale.
C’est grâce à lui qu’elle sait que sans cette poudre magique, le jambon cuit ne serait pas rose, mais grisâtre.
– Mais attention! disait-il. Il faut en utiliser le moins possible!
Sur le feuillet de la recette il a écrit: « 60 gram salpeter voor 10 liter water » comme grand maximum. Utiliser le pèse-lettres ou la petite balance de pharmacien.
Ce qui signifie que lui aussi, qui avait officié dans la boucherie héritée de son propre père déjà avant guerre, savait que ce n’était « pas bon pour la santé« . Qu’il en fallait juste un peu pour l’aspect et surtout pour la conservation.
Rien d’étonnant donc à ce que la discussion fasse rage ces dernières décennies sur le lien entre nitrates, nitrites et certains cancers.
Alors en apprenant que la France allait interdire ces produits, l’Adrienne a évidemment pensé à beau-papa.
Malheureusement le même jour, sans y prendre garde, elle a acheté de la bresaola – plus de quinze ans qu’elle n’en avait plus mangé! – et que voit-elle dans la liste des ingrédients?
En ces temps un peu particuliers, certaines choses prennent une importance… particulière!
Ainsi par exemple, le moment où on ouvre le paquet de café, chaque matin, et où on met le nez dedans, pour en inspirer goulûment les effluves…
et se dire que tout va bien, on a encore un odorat en parfait état de fonctionnement 🙂
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Une étude a révélé que les troubles du goût touchent 88 % des personnes infectées et 86% présentent des troubles de l’odorat, comme on peut le lire ici. Où on explique que la cortisone pourrait être un traitement efficace.
Le Boeing 747-8 de Francfort atterrit à Shanghai avant l’aube. Je me sens vaseux, fatigué, comme d’autres passagers après un vol d’environ onze heures au cours duquel les lumières se sont rallumées toutes les quatre heures pour que le personnel de bord puisse prendre notre température, qu’il faut noter au dos de notre carte d’embarquement.
Voor dag en dauw landt de Boeing 747-8 uit Frankfurt in Shanghai. Ik ben suf en moe, net als andere passagiers, na een vlucht van een kleine elf uur, waarbij dan nog eens om de vier uur de lichten van de cabine aangaan en het boordpersoneel rondgaat om je temperatuur op te meten. « In order to comply with the rules of the People’s Republic of China », meldt de captain. Op de achterkant van je boarding pass moet je je temperatuur noteren. Ik weet ongeveer wat er me te wachten staat als ik als één van de eersten uitstap in Shanghai.
Celui qui parle est un sinologue Belge, il vit en Chine depuis 12 ans et tenait à y retourner, même s’il savait combien les formalités allaient être lourdes, compliquées, contraignantes. Tests en Belgique avant le départ, tests à bord, tests à l’arrivée et deux semaines de quarantaine dans un hôtel spécialement prévu pour cela, comme il le relate dans un second article. Car pour la Chine, explique-t-il, il n’est pas question d’immunité de groupe ni de limiter les cas, on veut carrément atteindre le zéro. Zéro cas de covid-19.
« Il parcourt le formulaire que j’ai dû compléter en ligne avant le départ. Où j’habite, si j’ai fréquenté des bars ou suis allé à des événements publics sans être masqué, etc. et en bas de page une note me prévient de poursuites judiciaires si je fournis des données incorrectes. En Chine, ça ne rigole pas. »
Hij overloopt mijn gezondheidsverklaring die ik vooraf online had doorgegeven. Waar ik woon, of ik bars heb bezocht de laatste weken of naar openbare evenementen was gegaan zonder mondmasker, en zo verder, met de noot onderaan op het formulier dat foutieve info verstrekken strafrechtelijk vervolgd kan worden. China lacht er niet mee.
Zhengchang, tout est normal. Ce sont les seules paroles que j’entends sur une journée et mes seuls contacts humains […] à neuf heures et à quatorze heures, après un grand coup frappé à la porte.
‘Zhengchang ah, alles normaal.’ Het zijn de enige twee woorden die elke dag tegen me worden gesproken en dus ook meteen het enige menselijke contact. Dat op zich valt al bezwaarlijk normaal te noemen, maar alles went. Deze minidialoog speelt zich elke dag klokvast om 9 uur en om 14 uur af. De aankondiging van dit dagelijks ritueel is een hard gebonk op de deur.
Jusqu’à présent la Chine ne rapporte que 85 372 cas de Covid-19 dont presque 80% se situent dans la province de Hubei avec Wuhan comme épicentre. Shanghai compte 997 cas dont 90 sont des gens arrivés de l’étranger. Alors que c’est une métropole de 34 millions d’habitants. Même si ces chiffres étaient incomplets on peut tout de même affirmer qu’il n’y a pas de véritable irruption de la maladie.
China rapporteerde tot nu toe 85.372 gevallen van Covid-19, maar net geen 80% van die gevallen waren in de provincie Hubei, met de provinciehoofdstad Wuhan als epicentrum. Shanghai telt in totaal 997 gevallen waarvan ongeveer 90 mensen die positief testten bij aankomst uit het buitenland. En dat voor een metropool van 34 miljoen mensen. Zelfs al zouden die cijfers onvolledig zijn, dan is het nog steeds veilig om te stellen dat Shanghai nooit een serieuze uitbraak heeft gekend.
Il m’arrive de regarder par la fenêtre pour voir un peu de ‘vie normale’. Dans le bloc commercial d’en face, des étudiants viennent prendre leurs repas et sans doute aussi des bières, vu le bruit jusqu’à deux heures du matin. Je compte les masques: jamais je ne suis arrivé à plus de deux pour cinquante personnes, y compris les serveuses. Je vois peu de signes d’une ‘nouvelle norme’ ou d’une vie avec le Covid-19, comme en Occident, mais un monde où ce covid n’existe pas.
Op dode momenten staar ik uit het raam om een blik op te vangen van het normale, dagelijkse leven. In het commerciële blok tegenover me komen de studenten van de campus hun maaltijden nuttigen en, gezien het lawaai en gebral tot 2 uur ‘s nachts, vermoedelijk ook hun pintjes drinken. Ik tel het aantal gedragen mondkapjes: nooit meer dan twee op vijftig mensen geteld, inclusief de diensters van het restaurant. Ik zie weinig sporen van een « nieuw normaal » of « leven met Covid19 » zoals in het Westen, enkel een wereld waar covid-19 niet bestaat.
Un test négatif est la seule chose qui me sépare encore d’un retour au monde extérieur. Le 12e jour la brigade de testeurs frappe à ma porte sans s’être annoncée. On me dit d’arrêter la clim, d’ouvrir les fenêtres et de m’asseoir avec le dossier de la chaise tourné vers le couloir. J’étais en pleine ‘conference call’ avec une entreprise de Singapour et j’ai pu la poursuivre après avoir reçu deux bâtonnets dans le nez et un dans la gorge. Le verdict et mon éventuelle attestation de sortie suivront après-demain.
Een negatieve coronatest afleggen is alles wat me nog scheidt van een terugkeer naar de buitenwereld. Op dag 12 wordt op mijn deur geklopt door de Covid testbrigade die onaangekondigd kamer per kamer afgaat om stalen af te nemen. Ik krijg de instructies om de airco uit te zetten, het raam te openen en mijn stoel met de rugleuning naar buiten gericht in het deurportaal te plaatsen. Ik had mijn conference call met een Singaporees bedrijf onderbroken, met de melding dat ik even een Covid test moest gaan afleggen. Twee staafjes in de neus en één in de keel later vervoeg ik de vergadering, tot complete verbazing van mijn gesprekspartners. Het verdict en mijn eventueel vrijlatingsattest volgen overmorgen.
Poursuivre le voyage jusqu’à ma destination finale à Chengdu n’est pas une option parce que cette ville exige une quarantaine de sept jours chez soi – avec l’appartement sous scellés – en plus des quatorze qu’on a déjà passés et je n’ai pas envie d’avoir un affichage à ma porte « ici vit une personne présentant un risque de contagion ». Je préfère une autre façon de faire connaissance avec mes nouveaux voisins et resterai donc encore un peu à Shanghai.
Doorreizen naar mijn eigenlijke eindbestemming – mijn nieuwe stek in de stad Chengdu – hou ik nog even af. Het stadsbestuur eist er immers na 14 dagen hotelquarantaine nog 7 dagen thuisquarantaine, waarbij je appartement wordt verzegeld. Ik stel me de waarschuwingsborden al voor: « Hier woont een mogelijk besmettingsgevaar! » Ik kan me toch een betere kennismaking met mijn nieuwe buren voorstellen. Ik blijf dus best nog even in Shanghai.
Extraits du second article qu’on peut lire en entier ici
Ce n’est que tout récemment que l’Adrienne a reçu le choc de cette info: à l’époque où elle était petite fille, on opérait les bébés et les jeunes enfants sans anesthésie.
Oui, rétrospectivement elle en a éprouvé un réel choc.
Il lui a même fallu quelques jours pour s’en remettre 😉
Après avoir vérifié l’info, bien sûr, qui semble être une chose connue et révélée au grand public depuis plusieurs années, comme en attestent ce reportage sur Arte et cet article de Sciences et avenir. Ainsi que beaucoup d’autres.
Depuis, l’Adrienne a bien réfléchi.
Et elle croit mieux comprendre ce que voulait dire le chirurgien, quand juste avant de lui taillader le ventre, alors qu’elle n’était âgée que de trois semaines, il s’est tourné vers sa mère et lui a déclaré: « J’aimerais mieux couper dans votre ventre à vous! »
Si on vous demande, à votre avis, cette info est-elle vraie ou est-ce un canular: « Le ministère chinois de la santé recommande de traiter les malades du covid-19 à l’aide de bile d’ours et de poudre de corne de chèvre« , vous allez sans doute penser comme l’Adrienne que ce ne peut être qu’un canular.
Ou en tout cas vous allez espérer que c’en est un.
Ou un poisson d’avril, même si on est le 2.
Puis vous lisez l’article et vous constatez qu’il n’y a pas de limites à vos sources de stupeur et de tremblements.
« Les particules fines nous rendent plus bêtes », Fijn stof maakt ons dommer, titrait le journal de mercredi dernier, suite à des études prouvant leur impact sur les prestations du cerveau.
Des chercheurs des universités de Maastricht et de Bonn ont mesuré leur effet sur des joueurs d’échecs:
Voor elke bijkomende 10 microgram per kub steeg het aantal zware fouten met bijna 10 procent. Onder tijdsdruk was de impact van fijn stof nog nefaster. CO2 en temperatuur hadden geen effect op de foutenlast.
Pour chaque augmentation de 10 microgrammes de particules fines par mètre cube, le taux de fautes graves augmentait de près de 10 pour cent. Sous la pression du temps, cet impact était encore plus néfaste. Le taux de CO2 ou la température n’avaient aucun effet.
Les mêmes influences ont été notées dans d’autres études, comme les erreurs de l’arbitre (étude réalisée aux USA) ou les résultats des examens de fin d’études secondaires (étude réalisée en Israël). Un chercheur de l’université de Hasselt/KULouvain était déjà arrivé aux mêmes conclusions en 2016 avec des enfants de l’école primaire.
La plus mauvaise nouvelle est que si les effets sont réversibles sur le court terme, ils deviennent un véritable problème si on y est exposés de manière plus continue, réduisant par exemple les capacités cognitives des enfants.
Voilà qui devrait nous motiver à attaquer le problème, qui ne concerne donc pas seulement les affections pulmonaires ou les maladies cardio-vasculaires, mais aussi notre cerveau.
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article et source de l’image ici (copyright Rhonald Blommestijn) – un autre article ici.
– Madame! je suis en psychiatrie! écrit-il comme s’il s’agissait d’une vraie bonne nouvelle.
Alors, comme Madame suppose qu’il s’y ennuie ferme, elle lui demande s’il a le droit d’avoir des visites et rendez-vous est pris pour le lendemain.
Bien sûr, le renseignement qu’il lui a donné est tout faux, les visites ne sont admises qu’à partir de 17.00 h. et pas 16.00 h. Mais on laisse tout de même entrer Madame:
– Allez-y, dit l’infirmière bien à l’abri dans son cagibi, allez-y, puisqu’il est là.
Evidemment qu’il est là, se dit Madame, où serait-il d’autre?
Ce sont de joyeuses retrouvailles et de longues confidences jusqu’à ce qu’on apporte le repas du soir. Alors on se quitte avec la promesse de se tenir au courant des évolutions.
Mais quand Madame veut quitter l’aile psychiatrique, la personne de garde à l’entrée lui demande:
– Comment l’avez-vous trouvé?
Et ça, ça embête beaucoup Madame, qui ne veut pas avoir l’air de trahir la confiance qu’on a mise en elle.
– Rassurez-vous, dit le psychiatre, vous ne pouvez rien faire de mal, en donnant votre réponse, que ce soit un oui ou un non, c’est juste pour savoir s’il est toujours comme ça ou si vous l’avez trouvé changé, différent de ce qu’il est d’habitude…
Quinze jours exactement ont passé depuis et elle est encore « puzzled » par cette question.
La plus grande cause de stupeur et tremblements n’est pas qu’on s’inquiète que la recherche scientifique – principalement dans le domaine médical – soit de moins en moins indépendante. Et que poussée par ses sources de financement, elle arrive à des conclusions contraires au bien-être, à l’éthique ou à la vérité.
La plus grande cause de stupeur et tremblements n’est pas qu’on apprenne le même jour que la ministre de la santé publique envisage de fermer 17 maternités belges, sous prétexte qu’en dessous de 557 accouchements par an, ce n’est pas rentable.
Non.
Le pire, c’est qu’on ne s’en étonne même plus.
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photo d’illustration en référence à un des arguments pour garder ou fermer une maternité: la femme enceinte doit pouvoir accéder à une maternité en une demi-heure de voiture. On n’envisage pas que certaines ne disposent pas de ce moyen de transport. On ne parle pas des embouteillages, des heures de pointe, des travaux et des déviations. On préfère prétendre qu’il s’agit de la sécurité et du bien-être des bébés.
– Bonjour, Madame! dit un grand gars aux jambes largement étalées devant lui.
– Oh! bonjour! répond joyeusement Madame, tout en cherchant follement son prénom, son nom, quelque chose où raccrocher sa défaillante mémoire.
Il n’y a pas six mois qu’elle l’avait encore en classe, pourtant. Et qu’il était précisément celui qui lui donnait le plus de fil à retordre. Dyslexique et réfractaire au français 😉 Et voilà qu’ils se retrouvent tous les deux à bavarder dans la salle d’attente du médecin, comme de vieilles connaissances. Heureusement pour les épanchements, ils avaient le lieu pour eux seuls.
Mais ne croyez pas, amis lecteurs, qu’une rencontre en cet endroit soit la plus désagréable.
Il y a plus fort.
Il y a l’infirmière du service de radiologie, par exemple.
La plus gentille et la plus jolie des Julie, à qui vous devez confier votre corps.
Vous avez même déjà dû le confier à un médecin, un spécialiste, la plus charmante et la plus intelligente des Annelien (prononcer anneline), dont vous savez encore exactement à quel banc, dans quelle rangée, elle était assise.
C’est là qu’on se dit qu’on peut comprendre les collègues qui préfèrent continuer à habiter à quinze, trente ou quarante kilomètres de l’école.
Aucun élève ne voit leur caddie.
Aucun ne voit les secrets de leur corps.