
« Du fait de nos conventions familiales basées sur un nom transmis de père en fils, nous nous sentons à tort reliés au passé par une mince tige, sur laquelle se greffent à chaque génération des noms d’épouses, toujours considérés comme d’intérêt secondaire, à moins qu’ils ne soient assez brillants pour en tirer vanité. […] Qui – sauf exception – sait le nom de l’aïeul maternel de sa bisaïeule paternelle? L’homme qui l’a porté compte autant, néanmoins, dans l’amalgame dont nous sommes faits, que l’ancêtre du même degré dont nous héritons le nom. […] quatre arrière-grands-parents en 1850, seize quadrisaïeuls vers l’An II, cinq cent douze à l’époque de la jeunesse de Louis XIV, quatre mille quatre-vingt-seize sous François Ier, un million plus ou moins à la mort de saint Louis. […] c’est bien de toute une province que nous héritons, de tout un monde. L’angle à la pointe duquel nous nous trouvons bée derrière nous à l’infini. Vue de la sorte, la généalogie, cette science si souvent mise au service de la vanité humaine, conduit d’abord à l’humilité, par le sentiment de peu que nous sommes dans ces multitudes, ensuite au vertige. »
Marguerite Yourcenar, Archives du Nord, Gallimard 1977, p.45-46.
Au fil de sa lecture des Archives du Nord, l’Adrienne est tout le temps tellement d’accord avec Marguerite que ça en devient troublant 😉
Et oui, elle connaît « le nom de l’aïeul maternel de sa bisaïeule paternelle« , parce qu’elle s’attache à retrouver avec exactitude tous ceux qui l’ont précédée, et pas seulement cette « mince tige » basée sur le nom transmis de père en fils, qui est effectivement le fil le plus facile à suivre.
Il s’appelait Vanderhaeghen, ce qui veut dire ‘De la haie’ 🙂