Je suis le ténébreux miroir inconsolé
Ma batterie est morte et je suis constellé
de taches de café et d’autres petits reliefs de nourriture: c’est assise devant moi qu’elle boit et qu’elle mange. Car
Elle a pris ce pli depuis des temps très lointains
De venir m’allumer très tôt chaque matin
et de prendre tranquillement son petit déjeuner tout en me tapotant le clavier. Quand c’est l’heure de partir au travail, je sens bien qu’elle me quitte à regret. Elle me rallume dès son retour, nous voilà repartis pour des heures,
Voici des O, des I, des E, des U, des A,
Qu’elle a usés avec ses ongles et ses doigts
Elle m’emporte partout où elle va, j’ai vu l’Irlande et l’Italie, la mer du Nord aussi.
Ainsi, toujours poussé vers de nouveaux rivages,
Je suis très heureux d’avoir fait de beaux voyages.
Depuis quelque temps, je montre des signes de fatigue, nous luttons ensemble contre mon inexorable obsolescence programmée et je crains qu’elle ne pense bientôt à me remplacer. Même si
Il le faut avouer, l’amour est un grand maître.
Ce qu’on ne fut jamais, il vous enseigne à l’être.
C’est ainsi qu’elle a réussi à me tirer d’affaire, déjà une fois ou deux, et je lui suis reconnaissante d’avoir pu prolonger mon temps de vie, notre temps de vie commune, bien que nous ayons parfois nos nuages…
Mon plus grand ennemi se rencontre en moi-même
Je vis, je meurs, je me sens l’âme plus qu’humaine.
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merci à Gérard de Nerval, Victor Hugo, Rimbaud, Verlaine, Molière, Racine, Louise Labé, Lamartine, Du Bellay, à mon ordinateur bien-aimé et à l’Agenda ironique de juin